Exercice inédit d’écriture créative 291

chagrinElle avait des larmes majuscules
et des rires minuscules.
Elle confia sa peine à un  » Noyeur de chagrin « 
En une séance, elle fut guérie.
Voici comme il s’y prit…

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23 réponses

  1. Mizugame dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Elle confia sa peine à un « Noyeur de chagrin ». En une séance, elle fut guérie. Voici comment il s’y prit…

    Un jour, ou une nuit, elle ne savait plus réelement à quel moment, Jade avait perdu le sommeil. Peut-être l’avait-elle perdu derrière son oreiller, sous les draps ou encore dans son armoire entre deux robes de printemps et un pull d’automne. Persuadée qu’il se trouvait là, elle le chercha pendant des années ; le soir, faisant les cents pas dans sa chambre d’enfant, ou bien en comptant les moutons -peut-être que l’un d’eux l’aurait aperçut. Mais elle dû bien se rendre à l’évidence : son cher sommeil ne se trouvait plus dans sa chambre. Elle entreprit alors de le chercher dans la cour de récrée. En effet, il était peut-être tombé de sa poche lors d’un jeu de trappe-trappe. Malheureusement, ces investigations n’eurent pas plus de succès. Jade apprit alors à vivre sans. Elle se disait que, plus tard, quand elle ne s’y attendra pas, il reviendrait. Après tout, maman lui répétait toujours que « les choses que tu perds reviennent à toi lorsque tu ne t’y attends pas ».

    En grandissant ce compagnon fut oublié exactement comme s’évanouissent les rêves des p’tits culs. Les rêves se font toujours remplacés par des ambitions dites plus « réalistes ». Son compagnon de nuit disparu se vit alors remplacé tantot par des bras réconfortant, tantot par des livres lorsqu’elle eut passé des nuits pénibles à réviser, ou d’autres plus fatiguantes encore, à sortir, les verres devenant compagnons d’un soir. L’alcool l’aidait à retrouver ce vieil ami une fois par semaine. Pour le reste, elle prenait un ou deux comprimé de zolpidem (ou stilnox pour les intimes), devenu son meilleur allié après avoir essayé la phytothérapie, les comprimés de mélatonine, l’homéopathie, la médecine moderne, et la psychothérapie. Plus tard encore elle découvrit l’herbe.

    Les premières années passée avec cette nouvelle morphée étaient encourageantes. Jade dormait de nouveau à poings fermés. Elle était transportée chaque nuit dans des contrées exotiques, des contes de fées. Les rivières lapis-lazulis où nageaient des grenouilles rubis rivalisaient avec les cieux diamants où galopaient des chevaux de quartz. Et les forêts émeraudes regorgeaient de toute sorte de petits poissons ailés. Sans oublier les cavernes de jais où des nours somnolaient… Elle due pourtant tout stopper. Jane l’embrouillait. Elle ne parvenait plus à se concentrer. Son esprit devenait trop lourd à canaliser sur ce qui était important de réaliser. Etudier, travailler. Labourer. Labouré comme l’était une partie de son corps. Son visage commençait par être marqué. Des ridules venaient montrer le bout de leur nez au coin de ses yeux, au milieu de son front…

    Jade, comme à son habitude, quoique toujours un peu plus, demeurait fatiguée.
    Le corps ne devrait pas être une prison. Pourtant c’est ce qu’elle ressentait trop souvent. Il lui semble que, toujours, deux mains fermes lui empoignent les épaules et forcent vers le sol. Des vapeurs d’oignon doivent constamment être propagées dans l’air car l’iris, vert, de ses yeux parait toujours irrité. Les muscles de ses avant-bras aussi, rouspette sans cesse. Sans parler de son pouls qu’elle sent palpiter trop fort. Et sa tête surtout, en partant yeux et jusqu’aux oreilles est douloureuse. Même si, souvent elle ne s’en rend plus compte, ses symptomes deviennent fatômes. Elle devrait, aussi, arrêtait de s’enfoncer de la cire dans les oreilles pour trouver le sommeil lorsque la ville en a décidé autrement. Mais elle ne supporte plus le bruit. Même la journée, la télé, les klaxons, les bruits d’accélérateurs, les voix…. et même le chant des oiseaux ou encore celui des grillons l’oppressent.

    Elle pense avoir tout essayer. Les médecins ont cherché les raisons de son mal.
    Un traumatisme d’enfance. Peut-être la violence de son père, mais cela l’agace de devoir dire et re-dire qu’il y a prescription lorsque l’assistante sociale lui conseille de portée plainte. Ce n’est plus le cas à présent, et en quoi cela lui apporterait la paix de toute façon ?
    L’environnement est trop bruillant. Bien elle habite dans un village où il n’y plus un rat dès vingt et une heure dans les rues ni même une fenêtre encore allumée. Sa moitiée dort même sur le canapé pour plus de tranquilité.
    Elle fait peut-être une dépression, ce qui expliquerait les difficultés d’endormissement, les réveils nocturnes, les crises d’angoisse, la fatigue, le sentiment d’abbatement. Elle a essayée les anti-dépresseurs. Le psychiatre l’avertit que les médicaments, procurant au départ un regain d’énergie, pourraient conduire à des envies suicidaire. Il n’avait pas à s’en faire. Le sommeil toujours absent, la fatigue restait dans les parages pour veiller.
    Les écrans sont des excitants. Elle lit pendant deux heures avant l’extinction des feux.
    Le travail est source d’angoisses… Bien, elle a arrêté de travailler.

    [la suite au prochain épisode]

  2. Tulipe dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Elle confia sa peine à un « Noyeur de chagrin ». En une séance, elle fut guérie. Voici comme il s’y prit…

    Il questionna tout d’abord la dame âgée quant à ses capacités à se mouvoir. Celle-ci, piquée au vif, exécuta illico un grand écart. Devant cette prouesse, le professionnel n’hésita plus à lui demander de s’allonger sur le sol moquetté de la grande salle. Elle s’éxécuta sans effort.

    Après avoir psalmodié quelques incantations, il parvint à capter psychiquement l’âme de sa patiente, et fut surpris d’apprendre le souhait le plus cher de celle-ci.

    Par conséquent, afin que ses rires deviennent majuscules et ses larmes minuscules, plutôt que de lui redonner sa jeunesse comme il le pensait initialement, il lui ajouta dix ans supplémentaires.

    La vieille dame ne connaissant pas elle-même son voeu le plus cher, elle fut tout d’abord interloquée lorsque le magicien lui tendit un miroir et qu’elle y vit son nouveau reflet. Puis, elle éclata d’un rire crystallin, qui semblait ne jamais vouloir s’arrêter, elle rit aux larmes et pleura de joie.

    Elle avait conservé sa souplesse et son agilité, et était devenue désormais la femme contorsionniste la plus âgée du monde, elle en était très heureuse et extrêmement fière.

    C’est ainsi que la dame pris congé du noyeur de chagrin complètement guérie, en conservant un fou rire incontrôlable durant toutes les années que dura le reste de sa vie.

  3. Alexandre MP dit :

    Arlinda Libellule n’était pas en reste quand il s’agissait de dire du mal de ses petits camarades. Aux réunions agrestes, elle prenait souvent la parole pour surenchérir sur les défauts de Gédéon Crapaud ou Alceste Moustique – il faut dire que ces deux-là étaient particulièrement idiots. Et puis ses belles couleurs bleutées lui donnaient des ailes : elle se savait désirable. Parfois, ses sarcasmes visaient sa concurrente la plus directe, l’aguicheuse Natacha Vanesse des Chardons. Il fallait bien lui rabattre le caquet à celle-là.

    Mais ces rires cancaniers ne suffisaient pas à étancher sa peine. Car, dans le fond, Arlinda n’était pas une libellule heureuse. Ses parents avaient toujours été attentifs, pourtant, et s’étaient bien occupés d’elle. Mais la naissance de son petit frère avait quand même bien changé les choses. De princesse adorable, elle était devenue la gêneuse, la jalouse, l’empêcheuse, la méchante. Elle qui n’avait pourtant rien demandé s’était retrouvée à une place qui signifiait la ruine du pur bonheur de son enfance.

    Sa métamorphose l’avait cependant bien libérée de cette place familiale. Son esprit s’était émancipé. Et puis, il y avait Ricardo Maochan, dont elle rêvait secrètement qu’il lui déclarât sa flamme. Mais rien ne venait. Ricardo ne la remarquait même pas et n’avait d’yeux que pour Natacha Vanesse des Chardons. Seule, exclue, abandonnée, Arlinda pleurait et pleurait. Arlinda pleurait la nuit dans son lit, pleurait des flots si intarissables qu’ils menaçaient la rivière de crue.

    Et puis un jour, Yvon Limaçon aperçut l’Arlinda malheureuse. Profitant du flot des larmes, il rafraîchit sa viscosité en prenant une douche par ce chaud jour d’été. Une douche de larmes de libellule : que peut-on rêver de mieux, je vous le demande ? Arlinda intringuée se pencha vers Yvon et lui demanda ce qu’il pouvait bien être en train de faire. Les larmes s’arrêtèrent de couler. Le limaçon s’exclama : « de grâce, pleurez belle dame, vos larmes font mon bonheur! ». Il avait l’air gentil, cet Yvon. Elle voulait lui faire plaisir. Elle s’efforça de pleurer de nouveau, mais ne vinrent désormais que de timides sanglots. Elle expliqua à Yvon son embarras. Ils devisèrent et cherchèrent ce qui pouvait bien causer ces larmes, dans l’espoir de les ressusciter.
    Etait-ce Ricardo ? Arlinda pleura bien un peu à l’évocation de ce nom. Etait-ce le petit frère ? Il fallut bien admettre que ces souvenirs causaient quelque tristesse. Mais rien ne suffit et Arlinda fut bien en peine d’offrir au limaçon les grands flots qu’il souhaitait.
    Yvon en prit son parti et en fut bien dédommagé : il s’était fait une belle amie. Et puis, fort heureusement, même des années après, Arlinda continua de pleurer de temps en temps.

  4. francoise dit :

    Elle avait des larmes majuscules
et des rires minuscules.
Elle confia sa peine à un  » Noyeur de chagrin « 
En une séance, elle fut guérie.
Voici comme il s’y prit, du moins ce qu’ en dit la vox populi .La prenant dans ses bras il lui chanta « pleurer çà sert à rien, laisse un peu mourir ta peine dans un coin ». Elle le crut et mit ses chaussons de vair et telle Cendrillon, elle partit sur le grand chemin, accompagné de petits hommes minuscules. Et c’est alors qu’elle tomba amoureuse d’un prince charmant.Mais non, çà c’est une histoire que l’on raconte aux enfants pour les aider à s’endormir.
    Non, notre héroïne prit le taureau par les cornes, non pas pour aller bâtir des châteaux en Espagne, mais pour frapper à la porte de son dirlo :
    .qui est là ? Entre ! Ah c’est toi ! Que veux-tu ?
    -je suis venue te dire que je m’en vais t’attaquer aux pud’hommes pusque tu me vires, pourtant je ne te demandais pas la lune,
    -mais la lune je suis prêt à te la donner ! si tu la veux,nous pouvons aller la chercher ensemble à bicyclette.
    Et c’est ainsi qu’on vit notre héroïne acheter deux bicyclettes qu’elle cadenassa aux grilles du planétarium à Paris.On ne sait quand ils partiront mais,entre-temps ils randonnèrent à vélo sur le chemin de Compostelle.
    Les vélos à la grille sont un peu rouillés mais notre héroïne as désormais des étoiles dans les yeux…..

  5. PEHENNE dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Elle se confia à un « Noyeur de chagrin.
    En une séance elle fut guérie. Voici comment il s’y prit.

    Il convient avant de commencer ce récit d’apporter quelque éclairage sur le métier de « Noyeur de chagrin », métier rare qui a fait rêver des générations de psychiatres mais dont on ne souligne pas assez le degré d’exigence, d’effort sur soi, tant il nécessite pour être exercé avec talent des outils pédagogiques et psychologiques appropriés et le respect d’un ordre précis dans les temps d’écoute et d’intervention.
    C’est un beau métier mais qui appelle des qualités particulières. L’une d’être elles, et qu’on ne souligne pas assez (je pense notamment ici à ceux qui veulent se lancer dans cette belle carrière), est qu’il faut disposer naturellement et avant tout d’un moral résolument optimiste et être capable d’entendre les confidences les plus noires, d’être confronté aux aveux les plus sordides, et d’encaisser sans broncher les confessions les plus éprouvantes. Ce n’est pas un métier ouvert au premier venu. Il nécessite des années et des années d’apprentissage.
    J’apporte ces précisions afin qu’on comprenne mieux ce qui se passa ce jour-là.

    Elle pénétra donc dans la pièce aux tons clairs, sobrement meublée, dont la fenêtre aux rideaux blanc tombant droit sur le plancher en bois couleur miel, s’ouvrait sur les toits du sixième arrondissement de Paris.

    Il l’attendait derrière son large bureau de verre et d’acier sur lequel trônait une simple lampe, un bloc note et un banal crayon de papier.
    – Bonjour mademoiselle.
    – Bonjour maître.
    – Puis-je savoir ce qui vous chagrine ?
    – A vrai dire j’ai des larmes majuscules et des rires minuscules.
    – Je vois. Puis je vous demander, s’il vous plait, de déposer sur ce bureau vos larmes et vos rires.
    Elle s’exécuta.
    Il les regarda avec attention, sans que son visage ne trahisse une quelconque émotion.
    Il avait du métier. Un vrai professionnel.
    – Lorsque vous pleurez éprouvez-vous une peine ?
    – Non maître.
    Il ne savait pas pourquoi elle l’appelait « maître », mais cela lui plaisait et il ne la contredit pas.
    – Bien.
    A ce mot, un léger affaissement des épaules traduit chez elle un soulagement. Elle se détendait.
    – Que préférez-vous : rire ou pleurer ?
    – Rire, répondit-elle avec une spontanéité qui ne lui échappa point.
    – Bien.
    On sentait à travers ce simple mot qu’il avançait dans son analyse.
    – Préférez-vous faire ce que vous aimez faire ou faire ce que vous n’aimez pas faire ?
    – Faire ce que j’aime, maître.
    Décidément il aimait bien la façon dont elle lui répondait.
    – Bien. Puisqu’ il en est ainsi qu’est-ce qui vous empêche de ne faire que ce que vous aimez faire ?
    – Je ne sais pas maître.
    – Et si vous même ne savez pas, comment voulez-vous que moi je le sache ?
    – Ben …
    Un silence se fit. Il prit son bloc note et son crayon et il écrivit sans hésiter d’une écriture fine, sans chercher ses mots.
    Il arracha la feuille et lui tendit.
    – Voici votre ordonnance : commencez dès à présent à ne faire prioritairement que ce que vous aimez faire.
    -Bien maître.
    – Y a-t-il encore quelque chose qui vous chagrine ?
    – Non, maître.
    Et elle fondit en larme.
    – Mais que vous arrive-t-il ? Ne vous ai-je pas dit de ne faire que ce que vous aimez faire !
    – Oui, maître, mais c’est que je pleure de bonheur.
    Et il se mit à rire.

    Quand je vous disais que « Noyeur de chagrin » c’était un vrai et beau métier …

    PEHENNE

  6. Peggy dit :

    Larmes majuscules et rires minuscules

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules.
    Elle confia sa peine à un « Noyeur de chagrin ». En une séance, elle fut guérie.
    Voici comme il s’y prit…

    « Bonjour mademoiselle, installez-vous confortablement. Maintenant, détendez-vous, n’ayez pas d’appréhension, ça n’a rien à voir avec une intervention chirurgicale.
    Faites-moi un petit sourire. Vous voyez cela va déjà mieux, même s’il y a encore de grandes larmes qui glissent le long de vos joues.

    Laissez-vous aller un peu plus, je ne suis là que pour noyer votre chagrin et surtout ne pas émettre quelque jugement que ce soit. D’ailleurs, vous voyez, vous ne me racontez rien. Je n’en n’ai pas besoin. Vous allez voir, je vais faire revenir les rires en majuscules et de ce fait, les larmes vont devenir mini minuscules.
    Il va me falloir votre aide. N’ayez pas peur je vous expliquerai au fur et à mesure le déroulement de la séance.

    Je vais commencer par prendre délicatement ce chagrin, et l’extirper de votre cerveau. Ne vous inquiétez pas c’est indolore, par contre il faut que vous soyez très concentrée.

    Voilà c’est fait. Vous n’avez rien senti.

    Je le mets dans un verre d’eau pure et j’écris dessus : CHAGRIN, puis, je la gèle pour que les cristaux qui se forment soient ceux de ce mot. CHAGRIN va être emprisonné dans les molécules de glace, on laisse fondre et il va tout simplement se noyer. Puis on jette l’eau.

    Pourquoi je ne le fais pas directement ? Parce que j’ai essayé et ça ne fonctionne pas. Il faut passer par ces différentes étapes.

    Ah, je vois déjà l’effet ! Et vous que ressentez-vous ?
    Votre sourire suffit à me répondre.

    Chagrin noyé, on s’occupe des RIRES. Je refais la même manipulation. Un verre d’eau pure, y inscrire RIRES en majuscules. De nouveau on la met à geler. Il faut un peu attendre…

    C’est bon, maintenant on la laisse fondre…
    Là c’est différent. Buvez l’eau et ce sera fini. Il n’est pas nécessaire d’utiliser le même procédé pour LARMES puisque par conséquence elles deviendront si minuscules qu’elles disparaîtront.

    Vous allez sans doute être un peu fatiguée ce soir. Après une bonne nuit tout sera rentré dans l’ordre. Vous voyez déjà vos larmes ont séché et vous ne cessez de sourire. Ce n’est pas encore des rires mais ils vont vite venir.

    Ayez confiance, c’est très important. On a dû vous dire que je n’ai jamais eu d’échec sinon on ne m’aurait pas surnommé « Le noyeur de chagrin ».

  7. luxury bio dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules.
    Elle confia sa peine à un « Noyeur de chagrin ». En une séance, elle fut guérie. Voici comme il s’y prit…
    Il l’avait invité à s’installer sur le fauteuil de laboratoire, dans cette pièce qu’elle trouvait sobre où il lui semblait que la blancheur lunaire trompait l’espace et avalait toute l’architecture.
    Elle aurait juré voir le ventre lactescent d’une étoile naissante, le spectacle d’une éclosion céleste presque divin par sa pureté ivoirienne.
    Le Noyeur de chagrin n’avait ni l’envie, ni le besoin de s’exprimer pour se faire comprendre, il lui avait indiqué de s’installer par un signe de la tête.
    Son visage était détendu, confiant, apaisant, son regard imposait une certaine quiétude. Elle, reniflant les fils majuscules qui lanternaient à son nez s’essayait à la confession de son mal. Sa parole se noyait dans la sève de ses larmes qu’elle sentait couler au fond de sa gorge, et qu’elle ravalait comme des grosses perles d’eau. Elle tremblait de chagrin, il lui prenait les deux mains qu’il réchauffait par des gestes caressants du bout de ses doigts fins, il serrait les menottes frémissantes comme on serre dans ses bras un enfant tombé à terre.
    Elle sentait la chaleur du geste et elle percevait la compassion de l’homme, ce qui allégeait un peu de sa douleur.
    Maternant, le Noyeur de chagrin l’avait peu à peu sécurisée de manière à faire cesser la pluie de majuscules. Elle racontait sa peine, libérait sa parole des maux qui l’affligeaient et il écoutait, l’oreille tendue, le visage ouvert, penché au-dessus d’elle. Elle avait raconté, il n’avait pas noté, il n’en avait pas besoin, sa mémoire enflée retenait le moindre détail, la moindre bagatelle.
    C’était ensuite à lui de parler, il ne déclarait rien, n’affirmait rien, il posait juste les bonnes questions, celles qui amenaient à réfléchir, à reconsidérer, à relativiser. A mesure que les interrogations venaient bouleverser et bousculer sa conscience, elle reprenait possession de sa paire de mains qu’elle avait tiré de celles du Noyeur sans même s’en rendre compte.
    Elle se réappropriait son corps, il se mettait à parler pour elle, ses paroles s’accompagnaient désormais de grands gestes et signes des mains, de hochements de tête. Son regard s’éveillait, il s’animait sous des coups d’œil furtifs, des yeux surpris, des yeux écarquillés, parfois relevés par deux sourcils froncés qui venaient déposer des rides sur son front pâle. Il l’observait de toute sa bienveillance, reprenait à souhait la parole, il l’emmenait là où il fallait se trouver pour retrouver des rires majuscules. Les potions verbales du Noyeur de chagrin avaient redessinné un sourire sur son visage.
    Qu’avait-il bien pu lui dire pour que désormais elle se sente privilégiée et même chanceuse ?
    Après tout ce n’était ni de sa faute, ni le fin du monde avait-elle admis !
    Le Noyeur de chagrin avait su comme à son habitude trouver les mots, trouver la bonne formule. Elle contrastait avec le siège ouaté sur lequel elle s’était posée maintenant qu’elle avait repris des couleurs. Le grand cabinet froid et pâle comme la neige qu’elle avait trouvé à son arrivée s’était métamorphosé, elle pouvait apercevoir les murs allumés par la chaleur d’images hautes en couleur, elle pouvait sentir le doux rayon du soleil finir de déglacer la pièce. Le Noyeur de chagrin n’avait rien d’un magicien, il lui avait juste appris à voir les choses autrement, à voir les choses dans ce qu’elles ont de meilleur.

  8. Malika dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules.
    Elle confia sa peine à un  » Noyeur de chagrin  »
    En une séance, elle fut guérie.
    Voici comme il s’y prit…
    Elle était assise face à lui. Les larmes étaient encore présentes, silencieuses. Son visage tourné vers la fenêtre, elle laissait aller son chagrin.
    A un moment, sur un ton très doux, bienveillant, il lui posa cette question : « c’est quoi ces larmes ? »
    Elle ne sursauta pas, mais cela eut un effet immédiat, elle s’arrêta net, et se tournant vers lui, murmura : « je ne sais pas ».
    Lui savait qu’il avait touché quelque chose. Il reprit : « vous avez surement quelque chose à en dire, essayez ».
    Elle resta silencieuse. Son regard se perdait. Il balayait l’espace. Cherchant sans doute quelque chose à quoi se raccrocher, retrouver une assise. Et puis, elle le fixa du regard. Il lui sourit, comme pour acquiescer, l’encourager.
    Alors, elle sentit quelque chose en elle s’apaiser. Elle sourit à son tour. « Si, je sais, j’ai compris, mais je ne peux en parler là, maintenant ».
    Il lui proposa de mettre par écrit ce qu’elle ressentait, ce qui lui venait, sans se censurer.
    Elle sentit son corps se détendre. Les larmes avaient cessé de couler. Elle venait de comprendre qu’il venait de lui offrir un outil qui allait s’avérer essentiel pour elle : l’écriture.
    Son visage esquissa un sourire, qui se transforma en rire. Un rire minuscule.
    Quelque chose lui disait qu’elle était en route. Elle ne savait pas encore où ses pas, où cette écriture allait la mener, mais elle acceptait de s’y rendre.

  9. Smoreau dit :

    Elle avait des larmes majuscules
    et des rires minuscules.
    Elle confia sa peine à un « Noyeur de chagrin »
    En une séance, elle fut guérie.
    D’abord, elle se raconta. Il l’écoutait. Son enfance heureuse et malheureuse.
    Ses petites joies et ses grandes tristesses.
    La joie venait toujours après la peine, comme dit le poète.
    Elle pleurait à gros sanglots et une minute plus tard le nuage était chassé et elle éclatait de rire. On l’appelait Jean qui rit, Jean qui pleure.
    Personne ne la comprenait. Enfant, elle glissait déjà dans des gouffres puis s’envolait vers l’allégresse.
    Mr Noyeur de chagrin l’interrogea sur cette solitude émotionnelle. « Avez-vous eu un chat, Mademoiselle ». Oui, je l’aimais, il avait un grain, on se comprenait. Un jour, mon père le noya. Il riait, riait aux éclats. C’était un minus, mon père. Et depuis, je pleure en majuscules. Je pleure ce chat qui avait un grain et mon père le minus.
    M. Noyeur de chagrin se pencha et lui offrit un chaton tout fou.

  10. Isabelle Pierret dit :

    La césure de son ciel la disloquait autant que des rails tordus.
    L’horizon, un présent sans futur
    Les nuits , de leurs vides abstinents, l’accablaient d’un excès de vie
    Ses jours l’enrôlaient dans le travers amer d’un accent de néant
    Vertige
    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules.
    Et confia sa peine à un » Noyeur de chagrin »
    Écris, lis, couche-toi entre 2 haïkus
    Rêve
    Ne te retourne pas
    Vois le jour, seulement l’aurore,
    Demain est une surprise
    Bois la pluie, vole le vent et ensable-toi les mauvais soirs
    Détache-toi de ce chagrin putride
    Prends ce bain de roses
    Il est en toi

  11. Sylvie dit :

    Depuis quelque temps, Élise avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Femme de caractère, elle avait longtemps masqué sa douleur, mis son passé entre parenthèses. Mais aujourd’hui, elle n’en pouvait plus, tout refaisait surface. Sa joie de vivre avait disparu et la moindre contrariété prenait un accent grave. Elle ne pouvait pas continuer ainsi.

    Désespérée, elle confia sa peine à ce que l’on appelait communément un « noyeur de chagrin » qui, paraît-il, faisait des miracles. Quand elle lui expliqua ses symptômes, l’homme lui dit qu’il était en effet grand temps de noyer son chagrin. Il l’installa à une table de bois où se trouvaient une pile de papier blanc, une rangée d’encriers et quelques plumes, stylos et crayons. Pour la libérer de sa peine, il lui proposa de coucher sa tristesse sur un divan de papier.

    – Écrivez votre peine en lettres capitales, ouvrez les guillemets de votre cœur, et racontez, racontez…

    Élise trempa sa plume dans le premier encrier et n’eut aucun mal à écrire. Pendant des heures, elle noircit des lignes et des pages, sous l’œil attentif du noyeur de chagrin. Il lui semblait que la plume était le prolongement naturel de son bras, que les mots qui en sortaient allégeaient tout son être. Elle déversa ainsi sa peine sur la fibre du papier qui l’absorbait peu à peu mais ne la conservait pas.

    Après des pages et des pages, l’encre marquait de moins en moins le papier, il devenait moins vif, il pâlissait. La tristesse d’Élise, peu à peu, disparaissait, ne laissant aucune trace. Élise avait écrit son chagrin jusqu’à desséchement de la plume.

    – Vous voilà sur le point de fermer les guillemets, lui dit le noyeur de chagrin. Vous êtes guérie. L’encre des regrets est épuisée. Choisissez maintenant une plume neuve et trempez-la dans l’encre qui vous plaira.

    Élise préféra tailler le crayon aux espoirs pour se dessiner un nouveau départ.

    ©Sylvie Wojcik

  12. Ses larmes étaient écrites en lettres capitales
    Ses rires minuscules rendaient la mer étale.
    Elle confia sa peine au Noyeur de chagrin
    Qui le chassa au loin comme s’éloigne un grain.
    « Agathe, il ne faut pas t’offrir l’amer à boire
    Et plonger à dessein au gouffre des déboires
    Campe – toi fermement sur tes fiers stillettos
    Et lance tes arias, chante « Rigoletto »
    Bien cambrée, sur le haut du pavé, robe rose
    Arborée, en drapeau qui sur le mât se pose
    Navigue, Belle Agathe, sur les flots enchanteurs
    Berce – nous à loisir de tes refrains chanteurs. »

    Le Noyeur de chagrin a repris son errance
    Chassant sur son chemin le moisi et le rance,
    Rassérénée Agathe inscrit en capitales
    Son bonheur de chanter, son énergie vitale.

  13. ROBERT dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Elle confia sa peine à un noyeur de chagrin. En une séance, elle fut guérie. Voici comment il s’y prit. Il se lança un défi. Elle avait un mystère qu’il devait découvrir. Son mystère était dans ses colères. Pourquoi toujours en colère ? Ses colères étaient légitimes. C’est pourquoi il fut pris dedans. Parce qu’il ne tolérait pas qu’on l’ait fait souffrir. Car l’amour est universel, uni vers celle qu’il aime. Il devait découvrir pourquoi tant de mystère autour de ses colères. Mais elle lui renvoya sa jalousie. Pourquoi colère et jalousie ? Il devait comprendre. La colère cachait la jalousie. Et comme il était pris dedans ses colères il ne vit pas ce que cachait la jalousie. Sa jalousie cachait ce qu’elle voulait faire c’est à dire le tromper pour se venger du père qui l’avait trahie. Et c’est comme ça qu’elle fut guérie.

  14. maelle dit :

    Elle avait des larmes majuscules
    et des rires minuscules.
    Elle confia sa peine à un » Noyeur de chagrin «
    En une séance, elle fut guérie.
    Voici comme il s’y prit…
    Elle était assise face à lui. Les larmes étaient encore présentes, silencieuses. Son visage tourné vers la fenêtre, elle laissait aller son chagrin.
    A un moment, sur un ton très doux, très bienveillant, il lui posa cette question, : « c’est quoi ces larmes » ?
    Elle ne sursauta pas, mais cela eut un effet immédiat, elle s’arrêta net, et se tournant vers lui, murmura « je ne sais pas ».
    Lui, il savait qu’il avait touché quelque chose. Il reprit : « vous avez surement quelque chose à en dire, essayez ».
    Elle resta silencieuse. Son regard se perdait. Il balayait l’espace. Cherchant sans doute quelque chose à quoi se raccrocher, retrouver une assise. Et puis, elle le fixa du regard. Il lui sourit, comme pour acquiescer.
    Alors, elle sentit quelque chose en elle s’apaiser. Elle sourit à son tour. « Si, je sais, j’ai compris, mais je ne peux en parler là maintenant ».
    Il lui proposa de mettre par écrit ce qu’elle ressentait, ce qui lui venait, sans se censurer.
    Elle sentit son corps se détendre. Les larmes avaient cesser de couler. Elle venait de comprendre qu’il venait de lui offrir un outil qui allait s’avérer essentiel pour elle : l’écriture.

  15. Jarrier dit :

    Elle avait des larmes majuscules
    et des rires minuscules.
    Elle confia sa peine à un  » Noyeur de chagrin « 
    En une séance, elle fut guérie.
    Voici comme il s’y prit…

    Elle n’attendait pas vraiment de résultats, mais il fallait réagir. Elle en avait assez de cette vie en suspension, des interrogations capitales, de cette touche étoile inaccessible ou inefficace, des dièses à répétition. Le coach conseillé lui proposa une parenthèse spatio-temporelle, concept très prisé actuellement et lui proposa d’abord de changer de look, car son Verdura était dur à porter. IL la voyait bien en Comic, ou Avenir , pas de Luminaire trop sophistiqué, avec quelques ombres discrètes, douces nuances de couleurs, pour se mettre en valeur. Son élégance déliée lui permettait la fantaisie ! Elle avait un potentiel de caractères à exploiter, il fallait arrêter de se policer , place à l’imagination, aller voir dans toutes directions, jouer avec les flèches, abandonner les Contrôles, lâcher prise et elle s’aperçut alors que la touche Escape lui permettait des pauses, pour annuler ou sortir de situations embarrassantes. Elle découvrit ses émotions profondes enfin traduisibles par des émoticones . Adieu les blocages , elle allait tout se permettre , même les points d’ironie !!!

  16. Clémence dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Elle confia sa peine à un  « Noyeur de chagrin » . En une séance, elle fut guérie.

    Voici comme il s’y prit… ou plutôt, comment les choses se passèrent….

    Depuis des semaines, ils se relayaient pour tenter de minusculer ses larmes et majusculer ses rires.
    Rien n’y fit.
    Ses amis étaient usés, épuisés, désespérés.
    Ils menacèrent de l’exclure de leur clan de bons vivants.
    Ses amies étaient lasses, exténuées, vannées.
    Elles craignaient la contagion, la contamination de cette langueur désespérante.

    Un beau soir d’été, ils l’invitèrent dans une trattoria pour une dernière tentative.
    – Si tu persistes dans ton chagrin, nous commettrons l’irréparable…, lui dit le plus sage de la bande.
    Une larme majuscule et un haussement d’épaule minuscule traduisirent son désarroi.
    – Il est temps que tu te prennes en main…, enchaîna le kiné, de plus en plus nerveux.
    – Ça ne peut plus durer, surenchérit le cycliste du dimanche.
    – J’en ai marre, j’en ai marre, répétait la coiffeuse en se tortillant une mèche de cheveux.
    – Marre… marre…Maraboutficelle…. chantonna l’institutrice.

    Elle se leva et tendit le doigt vers l’institutrice.
    – Toi… toi…..

    Et elle s’en alla.
    Ils restèrent plantés là.

    Elle empoigna son smartphone, pianota, écrasa une larme, émit un petit rire et se mit à courir.
    Elle s ‘arrêta devant une porte de bois sombre. Frappa, tapa, cogna puis s’assit sur le seuil.
    La porte s’ouvrit doucement.
    – Viens, entre, et assied-toi, lui dit le Marabout. Je t’attendais…
    Une larme majuscule glissa sur sa joue, un rire minuscule s’effaça alors qu’elle prenait un mouchoir de dentelle.
    – Je te comprends, lui dit le Marabout. J’ai ce qu’il te faut …
    – Ah ? Sans que je ne m’explique…
    – Sans…, dit-il en se levant
    – Sans… répéta-t-elle en le regardant au travers de ses larmes-loupes.
    Il ne ressemblait en rien à l’image du magicien à la chevelure hirsute et au corps drapé de tissus bruts ou de peaux de bête…Il était beau. Tout simplement beau. A l’état brut.

    Il revint avec un grimoire. Il l’ouvrit et le posa sur ses genoux. Elle attendait…il tournait les pages…
    – Spielberg et Clint Eastwood cherchent une doublure de pleureuse pour leur prochain film…
    – ….
    – La Scala cherche une ouvreuse qualifiée en distribution de larmes pour la prochaine saison « Les larmes à l’Opéra ».
    – ….
    – Mmmm… Tiens ? La Corse souffre de pénurie de pleureuses…
    Elle poussa un soupir à fendre le coeur…
    – Alors… peut-être…, reprit le Marabout d’une voix profonde, je pourrais te conduire au Jardin Zoologique…
    – Mais pour qui me prenez-vous, souffla-t-elle entre ses dents …
    Il ne répondit pas et continua. Un crocodile est en attente de greffe de glandes lacrymales…
    – Je ne vous permets pas…vous me manquez de respect… vous…. Vous….
    Il tendit les bras vers elle en signe d’apaisement.
    – J’ai bien un remède… mais il est audacieux et comporte un certains nombre de risques…
    – Au point où j’en suis….
    – Voulez-vous être ma femme ? demanda-t-il, en posant le genou à terre et en écrasant une larme…

    © Clémence

  17. laurence noyer dit :

    Elle avait des SNIFF, SNIFF majuscules et des hi, hi, hi minuscules
    Elle confia sa peine à un « noyeur de chagrin »
    En une séance, kss, kss elle fut guérie, whaou !

    Le « noyeur de chagrin » voyait bien, haaaaaaa,
    Ses ronrons, ses pfffft, ses bof, ses berk !
    Il lui fit une ordonnance, ouf !
    Son tic-tac trop zap, son froufrou si buzz
    Il lui fallait du vroum, du surf on wouap !
    Ne pas laisser le badaboum faire schlack !
    Quand on crac et que le zip ne fait plus sbaf
    Faire appel à Ho ! Hey ! pour le Clap-Clap !
    Demander des Smack et puis des Lalala !
    Même si Toc-Toc fait Flip-Flap
    Essayer les Bzoung et les Hourra !
    En cas de Oups, pas de Argn !

    Et bientôt, Waouah !!!
    Ses sniff, et ses ouinnnnn
    Devinrent AH, AH, AH !!
    MWOUAHAHA !!!!

  18. Christine Macé dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Elle confia sa peine à un « Noyeur de chagrin ». En une séance, elle fut guérie. Voici comme il s’y prit…

    Il lui demanda une de ses larmes qu’il examina minutieusement.
    Elle le regardait faire, dubitative et confiante à la fois. On lui avait recommandé ce curieux guérisseur, dont elle ignorait jusqu’alors le titre et la fonction. Mais pour éviter la noyade, elle était prête à tout. Peut-être lui apprendrait-il à nager ou à se laisser porter par le courant et finalement, rejoindre la rive.
    Sans un mot, il lui rendit sa larme qu’elle remit en place délicatement sur son œil gauche. Puis elle attendit.
    Une mouche, entrée par la fenêtre entrouverte, se posa sur le crâne chauve du drôle de sieur. Ça lui donna envie de rire, ce qu’elle fit aussi discrètement que possible, comme on cache une toux incongrue. Il attrapa au vol ce sourire minuscule et chaussa ses lunettes pour en apprécier les contours. La mouche avait disparu.
    Reprenant son sérieux, elle était de nouveau attentive à son interlocuteur.
    Il ferma la fenêtre pour éviter que ce petit rire, si fragile, ne s’envole lui aussi. Avant de le placer dans un coffret grand comme une boîte d’allumettes.
    – Il faut en prendre soin, l’arroser chaque matin : juste une larme, pas plus.
    Puis il se leva, signifiant la fin de la séance. Doucement, il referma la porte derrière elle.
    Dehors, elle fut saisie par le brusque soleil. L’émotion déjà brouillait son regard. Une seule larme par jour, pas plus… Il lui vint un sourire…

    Bon week-end, Christine

  19. Dolorès dit :

    Elle avait des larmes majuscules et silencieuses.

    Des rires minuscules, comme le cui-cui d’un oisillon.

    Nul besoin de confier sa peine.

    Le « Noyeur de chagrin », le sage et dévoué chef de la tribu, témoin du drame, la prit sous son aile.

    Il lui susurra des mots suaves et mystérieux, la cajola, la berça.

    Peu à peu, elle s’apaisa et s’endormit.

    Il s’installa chez elle, fit pour elle les tâches quotidiennes.

    Il lui raconta des contes fabuleux et magiques.

    Sans oublier de chantonner. Vous savez, cet air si gai et si mélodieux, tel celui du pinson.

    Mais pas de leurre !

    Apprivoiser la douleur !

    Délicatement ! Discrètement ! Patiemment !

    Une guérison ?

    Oui, un jour viendra, où elle aura des larmes minuscules et des rires majuscules, où l’image de cet instant tragique s’estompera.

    Elle n’eut pas le temps d’avertir, impossible de crier.

    Le monstre n’a pas ralenti.

    Et a tué son petit.

  20. durand dit :

    Elle avait des larmes majuscules et des rires minuscules. Elle confia sa peine à un « Noyeur de chagrin ».

    Il n’avait pourtant rien de génial à lui proposer. Juste une croisière entre les bouteilles de champagne. Quelques gouttes dans les yeux chaque soir et elle espérait mieux traverser les remous du fleuve de sa nuit.

    Elle riait un peu plus mais ce n’était que des rochers affleurant la surface de sa douleur.

    Dans ce torrent là, les émotions comme des poissons volants retombaient sous le poids du banal courant.

    Rien n’y était merveilleux. Les châteaux bavaient leur peinture fraîche sur les falaises. Des Lorelei de carton laissaient moisir leur perruque au fil décousu des eaux. Les légendes trônaient dans des bulles. On n’était jamais loin d’un monde de Mickey.

    Arrivé au soi-disant bon port, on s’apercevait toujours avoir oublié le ticket du retour. On s’entassait dans le vieux bus de la réalité. Ca couinait un peu de tous les essieux. Tous ces virages en bordure d’histoire, on ne désespérait pas de finir dans un accident commun de la route.

    Et puis finalement, on retrouvait l’emplacement, la base de cette petite excursion.

    Au milieu de la place, fallait ‘il tout ce chemin pour s’en apercevoir, un saule pleurait.

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