L’inspiration suffit, qu’importe la technique !

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J’ai longtemps entraîné des dirigeants et des politiques à parler en public et peaufiné leurs discours. J’ai d’ailleurs écrit un livre sur ce sujet. Lorsqu’une personne doit s’exprimer devant un groupe, plus il est important plus elle se croit en danger. Elle s’angoisse par crainte de ne pas être à la hauteur. S’il s’agit de parler d’un événement ou d’une réalisation, ce n’est qu’un affolement. Une inquiétude due à la hantise de ne pas maîtriser parfaitement son sujet.
Une simple mise en confiance permet d’apprivoiser ce trac.

Mais, quand il faut parler de soi, de façon à valoriser sa propre personne, c’est la panique. À moins d’avoir un ego démesuré, on a toujours peur d’en faire trop, de paraître très prétentieux, trop m’as-tu-vu, ou bouffon. Il faut l’aide et le soutien d’un accompagnateur professionnel pour ne pas vivre les affres de l’orateur pétrifié, transpirant jusqu’aux os.

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Bizarrement, de nombreux écrivains débutants racontent leur vie sereinement. Sans peur du ridicule. Tout à coup, sans aucune préparation, ils se lancent dans l’écriture d’un livre dont ils sont les héros.
Le personnage principal de leur « roman » c’est eux-mêmes. Il raconte : sa petite école, ses amours d’ados et d’adulte, sa famille, ses amis, sa carrière, ses réussites et ses déboires, une enfance plus ou moins difficile.
Et, immanquablement, un lieu qui lui tient à cœur.


Alors, clichés, banalités, lieux communs et poncifs s’accumulent et gangrènent la moindre chose : descriptions et dialogues, comparaisons et métaphores, etc. Après quoi, une fois le premier jet écrit puis relu, quand ces novices croient leur livre abouti, ils l’adressent aux éditeurs et attendent fébrilement que leur talent soit reconnu.

Les semaines passent et rien. Aucune réponse intéressante, tout juste quelques courriers stéréotypés les encourageant à poursuivre…
Bientôt, l’amertume s’installe, ils s’estiment incompris, injustement rejetés et maltraités. Pourquoi Annie Ernaux ou Christine Angot mais pas eux ?


Qui osera leur dire qu’un roman n’est pas un compte rendu de ses réminiscences, un dossier détaillé de sa vie, un carnet de voyage monotone, voire, un exercice de rédaction ennuyeux ? Certainement pas leurs amis, qui lisent pourtant beaucoup…
Au cours de notre vie, on apprend à marcher, conduire, nager, une langue, un métier, à vivre. Mais, contrairement à ce qui se fait aux États-Unis dans les ateliers d’écriture créative, chez nous, on n’apprend pas le métier d’écrivain, l’art de raconter des histoires.
Nous avons appris à écrire à l’école, c’est bien assez.
L’inspiration suffit, qu’importe la technique !

Je suis hors-n’homme. Un neuroatypique à dominance dyslexique atteint d’aphantasie : incapable de fabriquer des images mentales et de se représenter un lieu ou un visage. Mes facétieux neurones font des croche-pieds aux mots dans mon cerveau et mon orthographe trébuche souvent quand j’écris. Si vous remarquez une faute, merci de me la signaler : blog.entre2lettres(at)gmail.com

12 réponses

  1. AB dit :

    Je suis l’enveloppe qui est restée coincée dans le tiroir, j’ai du sang plein les mains mais je suis innocent. Je suis l’étudiante qui se repend d’avoir volé son libraire vingt ans auparavant. La petite danseuse qui rêve d’être une étoile ou la rose qui aime la ronce. Enfin, je suis la pluie, le vent. La vie ou la mort. Je suis tout ou rien parce que je grâce à l’écriture je peux être ou ne pas être.
    Merci Pascal pour tous vos sujets qui nous emmènent les uns et les autres vers toutes les galaxies.
    AB

  2. Cecile dit :

    Écrire sur soi, n’est pas si facile. Pris dans les souvenirs et les émotions on peut écrire « mal », mais les mots sont si puissants qu’ils permettent qu’on les utilise un peu comme on veut. Le tout après, c’est de savoir si on veut les partager et sous quelle forme.
    Un jour, j’ai participé à un concours d’écriture sur un « souvenir d’enfance ». J’avais un souvenir douloureux que je voulais « liberer » de ma mémoire pour pouvoir, enfin pour pouvoir passer à autre chose. J’ai écrit pour moi, sans penser une seconde aux « autres »les lecteurs. Poster ma nouvelle a été libérateur ! C’est ce geste, d’écrire d’imprimer de lire puis de poster comme si je jetais ce souvenir non pas à la poubelle mais dans une boite sans fond lâché aux oubliettes, ce geste qui a été un second souffle de vie.
    Lorsque j’ai appris que j’avais « gagné » un énorme doute m’a submergé… mais j’ai franchi le pas d’accepter que mon souvenir, ma douleur, soit lié à d’autres vérités ou fictions… et j’ai pu tourner la page.
    Long commentaire pour expliquer que quand on écrit, on ne connait pas toujours le pouvoir des mots même sinon s’en doute.
    Bon vendredi et excellent week-end

    • Perrat Pascal dit :

      Merci Cécile pour ce beau témoignage. Libérer sa mémoire affective pour pouvoir, enfin passer à autre chose et une bonne idée

  3. Kimcat dit :

    Coucou Pascal
    J’aime écrire alors je suis ravie d’être arrivée jusqu’ici grâce à Cécile « Ecrimagine »
    Je reviendrai !
    Je dois m’absenter de la toile quelques jours à partir de demain.
    A bientôt.
    Bonne journée
    Béa kimcat

  4. Elisa Tixen dit :

    Bravo Pascal pour cette nouvelle publication. Et merci de ta générosité à partager ton expérience.

  5. Christine Esnault dit :

    Certaines vies peuvent être palpitantes, mais ce que nous offre l’imagination est une liberté que nul homme ne peut vivre! Pour ma part, quand je m’installe au chaud dans ma tête et que je me laisse aller, tout devient possible! Je franchis des montagnes, je joue avec des dauphins, j’explore des forêts magiques, je vole, je visite des galaxies lointaines, je suis une femme, je suis un homme, je suis jeune ou vieille et sage… L’espace et le temps ne sont plus des limites; je suis libre et c’est bon! Ensuite, si on a le goût de partager ses rêves éveillés, il y a les mots. Quelle chance nous avons d’avoir les mots! Ils ont ce pouvoir incroyable de créer des images dans la tête des autres. Alors pourquoi se contenter de raconter une vie, aussi palpitante soit-elle, quand on a tout ce matériel à portée de plume pour aller tellement plus loin?

  6. MEZIER dit :

    Bonjour Pascal, bonjour à tous,
    Ce site – cher Pascal – me semble une pépite (j’ai déjà dû l’écrire ququ part). Je n’ai pas encore eu à m’en servir beaucoup mais je ne rate pas une édition.
    M’en servir beaucoup pour l’instant… pour l’instant..
    Merci en tous les cas.
    Pascal

  7. Zeller dit :

    Tout à fait vrai !
    Pas si facile de faire passer ce qui fait l’originalité de chacun !

  8. Malaurie dit :

    Bonjour Pascal,

    Merci pour cet article, fort intéressant et pertinent.

    Une question me taraude depuis toujours, et peut-être pourriez-vous m’éclairer un peu sur ce point : comment savoir si ce qu’on écrit est intéressant ? Si le sujet ne parle qu’à soi ou à d’autre ?

    Merci d’avance, et surtout merci de prendre le temps de partager avec nous votre savoir de l’écriture !

    Malaurie

    • Perrat Pascal dit :

      Bonjour Malaurie

      Vous mer posez une question à laquelle il est impossible de répondre.
      Le succès d’un livre tient à peu de chose, l’air du temps,
      un sujet concernant tout le monde ou une cible bien précise,
      une histoire originale telle Harry Potter,
      sexuelle comme Cinquante nuances de Grey,
      la manière dont il est écrit, etc.
      Au fait, quel votre sujet ?

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