Exercice inédit d’écriture créative 117

Il passa devant une boutique,
qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME »
Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait
Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il,
il est peut-être temps de commander mon fantôme.

Il entra…

Inventez la suite 

14 réponses

  1. Clémence dit :

    Il passa devant une boutique qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME »
    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait.

    – Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il, il est peut-être temps de commander mon fantôme.
    Il entra tout en se demandant ce que voulait dire « Self fantôme ». Fantôme, oui, mais self ? Encore une de ces inventions venue de je ne sais quel créateur.
    Lorsque ses yeux s’accoutumèrent à la lumière de l’intérieur, il découvrit une pièce d’une grande beauté. Quelques touches de velours rouge souligné de dorures mettaient en valeur des tableaux de maîtres. Les pattes sculptées d’un fauteuil Voltaire s’enfonçaient délicatement dans les motifs délicats d’un tapis d’Orient. Un sublime Stradivarius était posé sur le siège recouvert de Jacquard de soie vert amande et paille. Une fenêtre à meneaux s’ouvrait sur une roseraie aux couleurs pastel.

    Hector passa lentement sa main dans sa chevelure argentée. Il était ébloui, tout simplement.
    Il sursauta lorsqu’il entendit la voix de ténor lui souhaiter la bienvenue. En se retournant, il s’attendait à trouver un Méphistophélès ou à un Radamès ! Non, il se trouva face à un personnage banal. Taille moyenne, visage sans signe particulier, une vingtaine d’années, costume moulant et chemise à lavallière.

    La conversation s’engagea aisément après qu’Hector fit part de son ignorance concernant le terme « self ».

    Le commerçant lui confia qu’il voulait bien accorder tout le temps et toute l’attention nécessaires à l’achat de ce « self fantôme ». Dans un même élan, il déclara s’appeler Antonio.
    Antonio présenta des habits de toutes les époques, de la nuit des temps à aujourd’hui.
    Suivirent des habits de toutes les contrées, des pays les plus lointains aux villes les plus proches.
    Les couleurs, les tissus, les motifs explosaient tels un kaléidoscope géant.

    Hector demanda à essayer quelques tenues. Le commerçant présenta discrètement les accessoires assortis.
    Hector ne parvenait pas à se décider. Il se trouvait impérial en César et royal en Louis XIV. Il se plaisait en manant, en amiral, en aristocrate. Plus il essayait de tenues, plus il hésitait. Plus il hésitait, plus il était exigeant. La patience du commerçant était exemplaire, l’indécision d’Hector entrait doucement dans la légende.

    Après quatre heures de discussions et d’argumentations, Hector interpella le commerçant et lui demanda :
    – Dites-moi, Antonio, sincèrement, si vous étiez à ma place, quelle fantôme choisiriez-vous ?
    Le commerçant fut d’abord désarçonné par cette requête. Cependant, il se fit affable, bien qu’un certain agacement se porta sur ses intestins qui se mirent à gargouiller dangereusement.

    Il lui apporta, presque cérémonieusement, un habit. Un habit éblouissant.
    – Damnation, s’écria Hector, qui n’avait que le prénom de commun avec Berlioz !
    Il demanda à Antonio de bien vouloir l’endosser. Il se rendrait mieux compte de l’effet. Le commerçant obtempéra.

    Un rire diabolique explosa dans le local.
    Antonio se mua en spectre.
    Hector retrouvait ses vingt ans, sa vie s’ouvrait devant lui.

    Sous les cieux d’Italie, Berlioz devrait apprécier ce synopsis.

  2. Sabine dit :

    Il passa devant une boutique, qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME ».
    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait.
    « Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il, il est peut-être temps de commander mon fantôme. »
    Il entra :
    « – Bonjour madame. Je viens commander mon fantôme, mais j’ignore comment on s’y prend.
    – C’est très simple : il suffit de choisir où vous voulez habiter, si vous voulez des pouvoirs, si vous voulez apparaître… Voici le questionnaire. Quand vous l’aurez rempli, je vous ferai des propositions. Prenez votre temps et revenez la semaine prochaine. »

    Dès le lendemain il entra à nouveau dans la boutique :
    « -Bonjour madame, j’ai rempli le questionnaire.
    -Déjà ? Très bien. Je l’étudie et je vous rappelle.
    -Inutile, c’est tout trouvé : je veux habiter ma maison, revenir sous mon apparence actuelle, mais en plus laid, plus méchant, voire cruel. Puant, vicieux et regorgeant d’imagination pour les mauvais coups.
    -Mais je n’ai pas une pareille horreur en magasin !
    – C’est dommage. Je l’aurais emmené huit jours à l’essai pour montrer à ma femme ce qui l’attend si elle essaye encore de m’assassiner…
    ©Margine

  3. ourcqs dit :

    …. il entra, et s’aperçut qu’il n’avait jamais réfléchi à cette filiation !! Pour lui ce serait

    un fantôme très personnalisé, tous ces spectres en drap blanc étant obsolètes .Son

    ombre serait caméléon ,et utiliserait les nouvelles technologies . Les chaînes à

    cliquetis, abandonnées pour un sillage de parfum très suggestif . Il imaginait un

    souffle de vent marin, très frais, qui effleurerait la foule entassée dans le métro, les

    jours de canicule , des notes vertes, boisées contre les effluves des voitures, des

    senteurs de cuir, vieux livre, tourbe pour les soirées de quelques solitaires .Il

    composerait des fantaisies des surprises !!! Dans les nuits sombres, il serait

    rassurant, une présence sympathique, des clins d’oeil lumineux, colorés, et en cas

    de problème des signaux sonores , pour éloigner les perturbateurs . Jouant les

    passe-muraille, il pourrait enfin se glisser dans des lieux secrets, inaccessibles à

    tout terrien , les coulisses des palais, et jouer des tours facétieux aux importants !!

    et pendant les nocturnes des musées, incarner( expression sans doute difficile ) les

    personnages des tableaux , dans les salles et escaliers; prolonger des scènes,ou

    en créer d’autres , un vieux rêve d’enfant !! Surtout, il resterait en contact avec

    famille et amis, avec des bruitages des effets lumineux familiers ,et serait complice

    de toutes les rencontres …

    C’était décidé il aurait un SUPER FANTOME …..

    ourcqs

  4. gepy dit :

    Il passa devant une boutique,
    qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME »
    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait
    Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il,
    il est peut-être temps de commander mon fantôme.

    Il entra…
    Et ressortit avec un contrat « d’essai » pour trois fantômes. « trois, c’est bien pour débuter sa recherche. Après, vous affinerez », avait conseillé le sympathique et très jeune vendeur.
    C’est surprenant, se dit-il, de traiter ce genre de dossier avec un gamin.

    Il lui suffisait de choisir un quelconque passant dans la rue ; de se concentrer sur le contrat, de le serrer très fort entre les deux mains et l’âme fantôme de ce passant l’envahirait. L’image physique n’existera qu’à mon décès, évidemment.
    « Soyez exigeant sur l’apparence, avait expliqué le jeune vendeur. Les autres fantômes y seront très sensibles. En général, ils se réunissent en clan en fonction de leur « physique ». Contrairement aux idées reçues, le fantôme n’est pas un solitaire. Il a besoin des autres pour s’exprimer et exister. S’il est trop différent, il sera rejeté pour l’éternité. »

    Arriva devant lui une superbe créature, longue, fine, élégante. Un coup de vent fit remonter sa jupe. « Comme Marylin, que de rêve ! » et il se concentra sur le contrat, en le serrant bien fort dans ses deux mains.
    Il se sentit immédiatement enrobé de douceur, de volupté. Et une idée obsessionnelle : protéger les enfants. Surtout qu’ils n’aient pas froid, qu’ils ne soient pas malades, qu’ils grandissent, qu’ils…Protéger les enfants… Une mère de famille. Non, ça ne va pas, pensa-t-il. Il me faut arrêter ce fantôme, il n’est pas pour moi cet instinct maternel et protecteur.

    Apparut alors un joggeur, la trentaine, à la foulée ample et dynamique. Oh oui, c’est moi, quand j’étais jeune. Même si, de mon temps, on ne courait pas.
    Et hop, concentration sur le contrat, les deux mains l’écrasant avec ferveur.
    Et hop, oubliées mes vieilles douleurs. Je suis transporté par la puissance, être le plus fort , le meilleur, être compétitif, être infaillible, aller plus en plus vite…
    Non, je ne veux pas de ce moi fantomatique, ce n’est pas moi. Je veux avoir le droit d’hésiter, de me tromper… Je ne suis pas un surhomme. Je ne l’ai jamais été.

    Quelque chose lui échappait : protéger les enfants. Non, être fort, très fort, pas le temps de protéger les enfants… Ne pas laisser les enfants mais courir plus vite, gagner, laisser les enfants derrière, on s’en fiche, pas le temps , ne pas courir, attendre les enfants… attendre, pas les enfants, vite pas protéger…

    Les deux fantômes étaient en lui et se disputaient la place de « sélectionné ». Tout se confondait.

    Je n’ai pas demandé comment me débarrasser du premier fantôme avant de passer au deuxième. Je suis perdu. On a toujours le même souci dans les self, il faut se débrouiller seul. Je vais avoir l’air stupide au magasin avec mes deux « combattants ».
    Mon troisième choix sera simple : un vieil homme, ce que je suis. ça fera bien l’affaire.
    Comme il est délicat de prendre le fantôme d’un autre. Mieux vaut garder le sien, c’est tellement plus simple et authentique.

  5. Françoise - Gare du Nord dit :

    Il passa devant une boutique, qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME »
    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait.
    Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il, il est peut-être temps de commander mon fantôme.
    Il entra…Une vendeuse, créature éthérée s’avança et lui demanda d’une voix sépulcrale ce qu’il désirait. « Désir » ! Ce mot-là avait justement été le maître-mot, le maître-étalon de sa vie. Et pour la première fois de sa vie, il ne sut pas ce qu’il désirait vraiment et ce qui, au fond, l’avait incité à pénétrer dans cette boutique. Le vendeur l’informa que l’entrée étant libre, il avait tout son temps pour réfléchir et qu’elle-même se tenait à sa disposition.
    Il déambula dans les allées, s’attardant devant les linéaires lorsque soudain, quelque chose attira son attention et attiré comme par un aimant il s’arrêta, devant la gondole des fantômes féminins, interdit et émoustillé à la fois, face à une lithographie .
    Il entra alors dans une phase d’excitation comme il n’en n’avait jamais connue. Et pourtant il en avait connu. Jamais une femme, même de chair et d’os, ne lui avait fait un tel effet. « Il me la faut » murmura t-il « il me la faut ». Il lui sembla avoir enfin trouvé celle qu’il cherchait depuis toujours à travers toutes les autres.
    Un vendeur fantomatique ayant perçu le vif intérêt qu’il portait à la gravure s’approcha de lui et commença :
    « Il s’agit d’une obscure divinité grecque, jamais entrée dans la postérité. Et pourtant, sa vie fut édifiante. Vous pouvez me croire. Je vous la fait courte. Elle mit, si vous me passez l’expression, le feu à l’Olympe et en fut chassée par Zeus, excédé par ses écarts de conduite. Elle tenta vainement de plaider sa cause, prétextant être à la recherche de son double masculin. Elle se trouva réincarnée en un être de chair et de sang doté d’une phénoménale longévité. Il faut croire qu’elle ne trouva jamais son Saint Graal car sa conduite ne changea en aucune façon. Au final, elle périt sur un bûcher auvergnat au début du XVe siècle accusée de stupre et de fornication. Depuis, une légende prétend qu’elle hante divers hauts lieux de la planète toujours en quête de son alter ego ».
    « Mais qui est cette créature ? » interrogea-t-il
    La réponse du vendeur le liquéfia
    « Déesse Kha »

  6. Pascal Perrat dit :

    Excellente l’idée « Allan Kardec » de son vrai nom Rivail…

  7. Saghey dit :

    Il passa devant une boutique,
    qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME »
    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait
    Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il,
    il est peut-être temps de commander mon fantôme.
    Il entra. Une femme se tenait derrière un comptoir, encombré d’objets plus ou moins hétéroclite.
    Elle feuilletait une sorte de livre de compte et ne releva la tête qu’au moment où l’homme se posta devant elle.
    « — En quoi puis-je vous aider ?
    — À vrai dire, je ne sais pas trop… c’est la curiosité qui m’amène. »
    Un sourire sur les lèvres, elle ôta ses lunettes, referma son livre et lui répondit ceci :
    « — Mais mon cher Monsieur, je suis là pour ça. Il est vrai qu’arrivé à un certain âge, beaucoup pense à leur funérailles mais peu à l’après.
    Et c’est bien dommage… car savez-vous qu’une fois que votre âme s’échappe de son enveloppe corporelle, il est déjà trop tard pour faire quoique ce soit ?
    Vous n’avez plus votre mot à dire, d’autres statuent sur votre sort. Soit vous irez au Paradis soit en Enfer, quant au Purgatoire, c’est bien trop surfait ! Faute de s’être préoccupé de réparer les dommages causés de son vivant vous n’y couperait pas !
    — Ah bon ? Vous en êtes sûre ?
    — Si j’en suis sûre ? Mais c’est une évidence ! Sachez Monsieur, que vous avez devant vous, Dolorès Eugenia Rivail. Je suis l’arrière-arrière-arrière-arrière petite-fille d’Hyppolite Rivail, plus connu sous le nom d’Allan Kardec. »
    En énonçant cela, elle bomba le torse. Mais comme son interlocuteur ne s’avéra pas impressionné outre mesure, elle fût prise de commisération à son égard.
    « — Mon pauvre Monsieur ! Vous n’êtes pas là par hasard… Rien n’est dû au hasard… Vous êtes venu me voir car vous avez besoin de conseils et c’est exactement ce que je vais m’empresser de faire !
    Mais d’abord, je voudrais savoir… si je vous dis fantôme, à quoi pensez-vous ?
    — Eh bien, je ne sais pas… je dirais château hanté, chaines qui claquent, des bruits dans la nuit, fantôme de Canterville, de l’Opéra, Casper, Ghostbuster, la dame bl…
    — N’en dites pas plus ! J’ai compris l’idée générale ! Vous êtes un néophyte. Ce n’est pas grave en soi, mais prenez garde aux idées préconçues !
    Je vais vous dire ce que m’évoque ce mot. Avant tout, un fantôme est pour moi, un mort qui peut communiquer avec les vivants, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un médium.
    Mais attention, tout comme il existe des personnes bien attentionnées, il existe aussi des fantômes sans scrupules. Ce qui n’est pas votre cas, je sens ces choses là.
    Suivez-moi, je vais vous montrer quelque chose.
    — Quoi donc ? »
    Elle se dirigea vers une bibliothèque, ouvrit l’armoire de gauche et en sorti un énorme livre avec une reliure dorée.
    « — Ceci, cher Monsieur, est mon livre d’or. Si vous voulez bien le feuilleter, vous pourrez constater par vous-même que tous ceux qui m’ont fait confiance, ne l’on jamais regretté ! Et quand je dis jamais, ce n’est pas un euphémisme ! »
    Il prit le livre qu’elle lui tendait et commença à lire les mots laissés par les clients. Au bout d’une dizaine de minutes, il planta son regard sur la femme qui était retournée à son comptoir.
    — Tout cela est bien beau… mais comment est-ce possible ? Qui me prouve que ces écrits sont véridiques ? »
    Elle eut de nouveau de la compassion pour lui.
    « — Ce n’est pas à moi de vous convaincre. Posez-vous seulement une question : Pourquoi, avez-vous soudain remarqué mon enseigne, alors que vous empruntez ce trajet deux fois par jour et cela depuis plus de quinze ans ?
    — Mais…, mais…, comment diable savez-vous cela ?
    — Le diable n’a rien à voir dans l’histoire, cher Monsieur. Simplement, vous étiez destiné à venir me voir.

  8. Sylvie dit :

    Il passa devant une boutique, qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME ».
    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait. Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il, il est peut-être temps de commander mon fantôme. Il entra. Une sonnette retentit quand il passa la porte. Il se trouvait dans un hall, une sorte de salle d’attente plutôt luxueuse : fauteuils anciens en velours grenat, installés autour d’une table basse en bois massif, épaisse moquette gris clair au sol, boiseries aux murs et au plafond. A sa droite, un comptoir avec une petite plaque en laiton où était gravé « SELF FANTÔME ». Il regarda autour de lui. Personne. Soudain il vit comme une volute de fumée blanche surgir de derrière le comptoir. Il s’avança doucement, appuyé sur sa canne, et fronça les sourcils pour essayer d’y voir plus clair.
    – Monsieur Legost, bienvenue chez SELF FANTÔME, Monsieur le Directeur va vous recevoir dans un tout petit instant. Veuillez prendre place, je vous prie.
    La silhouette blanche avait pris un semblant de forme humaine, tout en longueur et presque translucide. Elle avait un sourire un peu forcé et lui indiqua un fauteuil.
    – Euh… Merci, dit Legost, sans oser poser de question.
    Peu de temps après, Legost vit s’approcher un homme ou plutôt une silhouette masculine, de la même espèce que l’hôtesse d’accueil. Je suis bel et bien chez les fantômes, se dit-il. Le directeur, grand, mince, translucide et vêtu d’un costume bleu marine à rayures se présenta :
    – Monsieur Legost, enchanté. Angelo Spiritelli, Directeur de SELF FANTÔME. Si vous voulez bien me suivre, dit-il en inclinant légèrement son cou qui semblait élastique.
    Legost le suivit et ils entrèrent dans un immense bureau ancien, tout en bois, au mobilier massif et reluisant.
    – Cher Monsieur Legost, je suis ravi de vous accueillir. Comme vous l’avez pressenti, SELF FANTÔME vous propose de choisir votre fantôme et de préparer votre reconversion dans l’Au-delà. Dites-moi où et sous quelle forme vous souhaitez circuler une fois que vous aurez fait le grand pas, et je me chargerai de tout.
    – Je peux vraiment choisir n’importe quoi ?
    – Dites-moi tout ce que voulez.
    – Eh bien, je souhaiterais vivre – enfin si je peux dire – au plus près de ma famille, de ma maison. Je voudrais être un fantôme végétal, circulant parmi le lierre qui recouvre la façade de ma maison.
    – Oui… pourquoi pas. Ce n’est pas très courant, mais nous avons des équipes techniques très performantes qui savent s’adapter à tout et, après une étude de terrain, vous arrangeront tout ça. Sinon, une chose importante : un fantôme ne doit jamais se montrer aux vivants, ce serait une faute impardonnable qui vous enverrait sur-le-champ dans le néant, où vous disparaîtriez à jamais. Méfiez-vous de ne pas vous approcher trop près des membres de votre famille : bien sûr vous serez invisible, mais s’il vous arrivait d’attirer leur attention sur vous, par exemple en renversant un objet, ils pourraient se douter de quelque chose et, le Grand Magicien blanc – notre maître à tous – est formel : tout faux-pas est proscrit et sévèrement puni !
    – Pas de problème, je ferai très attention. Mais vous comprenez, je m’inquiète pour eux, je me demande ce qu’ils deviendront sans moi et… je voudrais veiller sur eux. Je ne sortirai pas de l’épaisse couverture de lierre, mais je pourrai naviguer sur la façade et me hisser de temps en temps pour aller de fenêtre en fenêtre voir ce qui se passe à l’intérieur, dit Legost d’un air attendri.
    – Hm… est-ce vraiment une bonne idée ? Pourvu que cela ne nous cause pas d’ennui… grommela Spiritelli.
    – Pardon ? demanda Legost.
    – Non, rien, répondit Spiritelli.
    – Je voulais aussi vous demander, reprit Legost, comment ça se passe concrètement ? Enfin, je veux dire, le passage et la transformation en fantôme.
    – Alors, voilà : dès demain, je mets en place mes équipes pour préparer votre fantôme. Non, tout d’abord, je soumets votre dossier au Grand Magicien blanc, mais pour vous, il n’y a pas de problème, vous avez une conscience vierge de tout soupçon, notre grand maître ne s’opposera pas à vous accepter parmi nous. Donc mes équipes se mettent au travail dès demain ou après-demain pour créer votre fantôme et nous le gardons bien au frais. Dès que vous aurez fait le grand saut, nous serons informés. Comptez environ une huitaine de jours de délai avant de prendre vos quartiers d’éternité, le temps pour vous de revêtir votre nouvelle enveloppe.
    – Parfait, autre petite chose, dit Legost, à combien se montent vos honoraires ?
    – A rien du tout, voyons, Monsieur Legost, rétorqua Spiritelli, vous avez été choisi. Les fantômes ont des valeurs bien plus nobles que les vivants.
    Et Legost quitta SELF FANTÔME plutôt content de lui et rassuré sur sa vie d’après.
    ……
    Quelques mois plus tard, alors que Madame Legost se promenait dans son jardin avec sa fille, cette dernière lui dit :
    – Au fait, Maman, tu ne voulais pas faire arracher tout le lierre de la façade ? Tu te souviens, tu te prenais toujours la tête avec Papa à ce sujet ?
    – Oui, c’est vrai, mais finalement, depuis que je suis seule, je ne sais pas pourquoi, je trouve que ce lierre, c’est plutôt rassurant.

  9. Nathalie dit :

    Il passa devant une boutique qu’il n’avait jamais remarquée jusque là : « self fantôme ». Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait. Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il, il est peut être temps de commander mon fantôme. Il entra.

    Il avait déjà organisé toute la logistique de son enterrement : son notaire était au parfum, et il avait profité de la super promo de Dia’def pour payer cash son cercueil en sapin et son dernier trajet en taxi vers le cimetière.
    Il ne manquait plus que son fantôme. Son fantôme, son homme de confiance dans l’au-delà. Un sacré boulot. Il veillera, en son absence, à ce que sa mémoire soit bien célébrée.
    Ainsi il sera garant de la bonne tenue de sa famille durant la cérémonie. Des pleurs, mais pas trop.
    Il sera le témoin de la fidélité de ses amis. En nombre, et le plus possible.
    En effet, il a pour mission, extrêmement capitale, de compter, de manière objective, le nombre de personnes venues à la mise en bière ou à l’enterrement, afin de reporter ce chiffre à côté de l’épitaphe du défunt. Dernier concours de la vie. Or, il faut négocier sa sortie de vie la tête haute. La réputation de la famille en dépend. La société étant exigeante. Le nombre inscrit sur sa pierre tombale traversera l’éternité. Un comptage approximatif est exclu.
    Il ne faut pas se tromper dans le recrutement de cet homme de confiance ! Mais dans cette boutique, peut être, il pourra tenter de soudoyer un fantôme bon vivant…

  10. Sylvianne dit :

    Bravo Maurice ! J’aime bien votre texte !
    Bon dimanche

  11. Smoreau dit :

    Il passa devant une boutique, qu’il n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME »
    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait
    Je me fais vieux, très vieux, songea-t-il,
    il est peut-être temps de commander mon fantôme.
    C’était un tournant. Une façon de préparer son dernier voyage. Il décida de choisir son fantôme avec soin. Il voulait qu’il lui ressemble mais… en mieux. Il allait commander un fantôme à l’image de ce qu’il aurait voulu être sur cette terre. Son double idéal.
    En vitrine, il aperçut des fantômes classiques : blancs, dérangeants, ceux qui font peur, réveillent les gens la nuit avec des chaînes.
    Lui, au contraire, voulait un fantôme bienveillant. Il apportera une brise de bonheur dans les cheveux des enfants. Un souffle de bien-être dans les hôpitaux. Il viendra se pelotonner sur les genoux des personnes qui souffrent. De la chaleur… Je désire un fantôme généreux, gai et réconfortant.Entre deux larmes, les personnes percevront comme un voile, une lumière rassurante.Pensait-il
    Il entra dans la boutique.
    Quand il énonça mes critères, la marchande fronça les sourcils.
    – « Je n’ai pas ça en stock ! », marmonna-t-elle dans ses moustaches
    – « Ce n’est pas grave, je ne suis pas pressé. Pouvez-vous le commander sur mesure ? »
    – Très cher, très cher…
    – Oui ? Mais combien ? Puis-je avoir un devis ?
    – Ouais, il faut d’abord que je contacte le curé. Dans ce genre de fantôme, je suis obligée de m’associer avec les anges.

  12. Christine Macé dit :

    Elle passa devant une boutique qu’elle n’avait jamais remarquée jusque-là : « SELF FANTÔME ». Elle voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle la retenait. Je me fais vieille, très vieille, songea-t-elle, il est peut-être temps de commander mon fantôme.

    Elle poussa la porte dont la clochette tintinnabula joyeusement. C’est de bon augure, pensa-t-elle, surprise tout de même par l’odeur d’encens ou de vieille église qui flottait dans l’air. Personne ne venant à sa rencontre, elle en profita pour jeter un rapide coup d’œil au lieu envahi de poussière. Un vieux comptoir en bois trônait dans la pièce avec une petite sonnette d’hôtel posée dessus. Des rangées d’étagères, totalement vides, flanquaient les murs garnis d’un papier peint défraîchi. Au fond, elle aperçut l’encadrement d’une porte garni par un rideau aux couleurs incertaines. Curieux endroit, décidément. Elle revint vers le comptoir et osa un « y’a quelqu’un ? » timide. Son appel resté sans réponse, elle le renouvela en actionnant la sonnette du comptoir.

    – Ça vient, ça vient…

    Un petit Chinois tout gris apparut et la salua en baissant la tête, les mains jointes sur sa poitrine. Elle eût envie de lui rendre sa politesse obséquieuse mais se contenta d’un simple bonjour.

    – Que puis-je faire pour vous ?
    – A vrai dire, je pensais trouver ici une collection de « self fantômes » comme indiqué sur la devanture… Apparemment, vous manquez de stock !

    Un brin moqueuse, elle cherchait surtout à chasser ses idées noires : pourquoi se sentait-elle soudain si vieille ? A peine plus qu’hier pourtant… À quoi rimait ce brusque changement d’humeur ? Elle tenta de se rappeler un détail qui aurait pu la contrarier mais n’y parvenant pas, se reprit à examiner le vieil homme qu’elle imagina passer son temps à errer dans cette échoppe dépourvue de marchandises.

    – N’en croyez rien, chère madame : nous venons de rentrer la nouvelle collection !… Si vous voulez bien vous donner la peine de prendre place sur ce modeste fauteuil, je vais vous les montrer…

    Il lui désigna une chaise branlante qu’elle épousseta discrètement avant de s’y asseoir. Le Chinois avait disparu dans l’arrière-boutique d’où lui parvenaient maintenant des bruits étranges : un vrai concert de boîtes de conserves, casseroles et autres ustensiles sans grand rapport avec ce qu’il prétendait y être aller chercher. Elle ferait mieux de partir avant le retour du vieux fou ! Sauf que sans trop savoir pourquoi, elle préféra attendre son retour.

    Combien de temps cela avait-il duré ? S’était-elle assoupie ? Un peu honteuse, elle se redressa au moment où il revenait, portant un paquet de fantômes bariolés qu’il déploya élégamment sur le comptoir :

    – Celui-ci sied à vos yeux bleus… quant à celui-là, il met en valeur votre teint de rose : vous devriez le passer, je suis sûr…

    Elle écoutait son babillage de marchand et se prit au jeu : elle se leva et lui demanda où était la cabine d’essayage, et si elle pouvait laisser son sac et son manteau sur la chaise. Avec de grands gestes, il lui montra la porte du fond vers laquelle elle se dirigea en se demandant s’il y avait là un coin discret pour se changer.

    – Voici vos articles et ne vous inquiétez pas, personne ne vous dérangera ! Prenez tout votre temps, il y a une glace…

    Et il s’effaça. La pièce exigüe était faiblement éclairée par une petite lucarne : un rai de lumière faisait briller le miroir posé à même le sol. Elle commençait à se déshabiller quand elle entendit tinter la sonnette de l’entrée. Un brusque courant d’air froid la fit frissonner.

    – Bonjour madame… Non, je suis navré… Les clients se font rares en ce moment : pourtant vous avez constaté que je n’ai pas lésiné sur la publicité ! Il faut attendre encore quelques jours, la période des soldes ne nous est pas favorable…

    Impossible pour elle de voir l’interlocutrice du Chinois qu’elle sentait brusquement fébrile, et même inquiet. Elle retenait son souffle. Sur la patère, les fantômes, blafards, s’étaient recroquevillés.

    – Il va falloir vous y mettre sérieusement si vous ne voulez pas perdre votre emploi ! Et ne me parlez pas de la crise, vous savez que pour moi elle est bénéfique : ils rêvent tous d’aller voir ailleurs, quitte à faire le grand saut ! Il n’y a qu’à se baisser pour les ramasser, alors au travail, sinon…

    Le silence qui suivit était oppressant, puis enfin elle entendit la porte du magasin se refermer en grinçant un peu. L’air redevint aussitôt plus respirable et les fantômes recommencèrent à s’agiter sur le porte-manteau en reprenant des couleurs. Réajustant la fermeture de sa robe, elle enfila ses chaussures et se précipita dans la boutique : le petit homme gisait, affalé sur la chaise, la tête entre les mains.

    – Qui était-ce ?
    – La grande faucheuse… Elle vous avait flairée et j’étais censé vous confier à elle… j’ai pas pu… j’ai pas pu…

    Il bégayait en dodelinant de la tête. La grande… Elle se mit à trembler et il lui fallut un bon moment pour reprendre ses esprits. Puis ce fut comme un éclair : elle fila décrocher les fantômes et revint dans le magasin, attrapant au passage le Chinois pour l’entraîner à l’extérieur en hurlant « dehors ! » comme on crierait « au feu ! ».

    – Vous avez un problème, madame ?

    Devant elle se tenait un policier : elle se retourna, mais ne vit rien d’autre que la rue avec son enfilade de boutiques qui commençaient à fermer.

    – Non… Non, merci !

    Et abandonnant l’agent dubitatif, elle se hâta de rejoindre le boulevard pour respirer la vie grouillante et se laisser entraîner dans son flot, heureuse, si heureuse de faire encore partie du monde des vivants.

    Bon dimanche, Christine

  13. Maurice Bartleby dit :

    A peine passé la porte il fut happé par une vendeuse à la jupe trop fendue et à la langue trop pendue, il mit un temps à faire remonter ses yeux de la cuisse blanche jusqu’aux yeux noirs en passant par la bouche trop rouge qui lui vantait les mérites de la boutique, les innombrables types de fantômes vendus, les principaux clients célèbres ou pas… Il appris ainsi que Mickael Jackson avait pris un fantôme dansant, Marie Curie un fantôme amibe et Louis Ferdinand Céline avait refusé toutes propositions, même au prix le plus bas.
    Il la suivie le regard posé sur son postérieur jusqu’à l’arrière boutique, là était présenté un bon échantillon des fantômes les plus demandés.
    Il y avait le vengeur qui plaisait surtout aux femmes trompées et aux maris assassinés. ensuite venait l’effrayant, aussi prisé chez les blagueurs que chez les méchants ou les revanchards. Le romantique avait eu son heure de gloire, mais elle avait vite passée. Depuis Hamlet on ne se posait plus de question sur l’existence. Avec les nouvelles technologies étaient apparus de nouveaux modèles : du cathodique surgit dans les années 50 et réservé aux apparitions télévisées, on était passé au tout numérique qui intervenait sur le net, aussi bien que sur les I-phone et autres GPS, provoquant accident et révélations aussi dangereuses et effroyables que celles de ses ancêtres…
    Alexandre n’avait aucune idée, pour lui l’immortalité était une erreur de la nature et il espérait ne rien trouvait de l’autre coté…
    Il demanda le modèle le plus simple : une unique apparition, à peine de quoi laissé un regret, de faire une bonne surprise ou de semer le doute…
    Il signa sans réfléchir, et sans regarder, les yeux toujours rivés sur le décolleté de la dame. Il sortit content de sa bonne affaire, c’était le plus économique… Il récupérerait la somme sur son assurance décès de toute façon.
    En traversant la rue, il songea aux formes rondes entraperçue entre deux bouts d’étoffes, évocatrices de plaisirs voluptueux… Et se fit renversé par un auto, fut transport à l’hôpital. Longtemps il resta entre la vie et la mort, comme hésitant. Dès que sa décision fut prise, il lâcha sa vie, la laissant partir.
    Le lendemain quelle ne fut pas sa surprise, lorsque débarquant dans la boutique pour retrouver la vendeuse propriétaire des formes évoquées plus haut, il découvrit que ce n’était qu’un fantôme en stage. Il regretta alors vraiment de n’avoir pris qu’une apparition…

  14. Jean de Marque dit :

    Galerie commerciale.

    Il passa devant une boutique qu’il n’avait jamais remarqué jusque là:  » SELF FANTÔME ».

    Il voulut poursuivre sa route mais une force surnaturelle le retenait.

    Je me fais vieux, très vieux, songea t’il, il est peut être temps de commander mon fantôme.

    Il entra.

    Une espèce d’apparition rouge l’accueillit. Elle se présenta: « Mme Ectoplasma, chef de rayon ».

    Dans ce monde de la prévision d’un au delà, pas besoin de discours. Le commerçant sait d’instinct à qui il a affaire, pourquoi il est là, ce qu’il souhaite.Il calcule les mensurations, feuillette le catalogue dans sa tête, farfouille dans les invendus, propose…Si on le laissait faire…il disposerai…un peu vite du choix de notre barcasse…, de notre future carcasse.

    La vie d’un humain est suffisamment contrôlée. Il apparaît pour le moins nécessaire qu’il puisse choisir l’esquif le transportant sur l’autre rive. De même pour le nouveau costume adopté. Seul le barge prend le même bac tous les jours, s’accroche au filin de la sécurité, porte éternellement les jeans du quotidien.

    Mme Ectoplasma l’entraîna dans l’arrière boutique. D’immenses rayons proposaient des draps de toutes les couleurs.

    Vu l’air grave du client, elle lui proposa d’office une classique toge blanche, le recouvrant de la tête aux pieds. Il se regarda dans un miroir: » Non, ce n’est pas possible, on dirait un romain en goguette dans les bas quartiers de Pompéi ».

    Un peu vexée, l’ombre commerciale lui présenta le modèle « Cordobés » ?? Non, pensa t’il…la mort n’est pas un taureau et il ne se voyait pas, l’affrontant avec ce ridicule chiffon rouge.

    Le pauvre eut droit à toutes les propositions: un drap de bain en peau de singe pour nager sur les traces deTarzan, un drapeau tricolore afin de marcher dans les pas désertés d’un beau légionnaire, un tutu en mousseline pour mimer les entrechats de la grande Pavlova.

    La boutiquière alla même jusqu’à lui proposer une sorte de nappe Vichy, à lui…résistant de la première heure.

    Le comble fut atteint avec la plus ridicule des gardes robes…un petit triangle de tissu vert pomme, dit vert Adam.

    Le problème demeurait. Et vu que le ridicule ne tue pas, il savait ne pas trouver, ici, vêtement à son corps, costume à son phantasme.

    Il se sentit plus jeune, rangea l’épouvantail au fin fond de son portefeuille, sortit.

    Sur la vitrine s’étalait un grand panneau qu’il n’avait pas vu.

    QUATRIÈME DÉMARQUE!

    Jean Démarque.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Répondez à ce calcul pour prouver que vous n'êtes pas un robot *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.