373e proposition d’écriture créative imaginée par Pascal Perrat

 C’était un lieu de culte très vénéré,
une station de taxis, impasse des Arts.

 Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage. Escomptant une faveur inespérée : être édité. À leur grande surprise…

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25 réponses

  1. osebo-moaka dit :

    Ce lieu de culte, forme intrinsèque de l’espoir avait une telle importance que plus d’un aurait vendu père et mère afin d’y être reçut.

    Jes Frenand reconnaît après une très longue et grande respiration assez douloureuse, que oui, il a en effet mis au clou la plupart des membres de sa famille afin de monter dans ce fameux taxi qui ne l’a pas emmener à Tobrouc mais rue des Franches Arnaques dans le but de voir ou d’apercevoir le Monstrueux Homme Blanc le fameux détenteur du plus grand, du plus merveilleux passe-partout ou sauf-conduit qui soit.

    Mais, à cause d’une grosse quinte de toux , le Taxologue la littéralement rejeté. Et c’est avec un regret presque palpable qu’il donne à l’inspecteur Degrandu cette simple explication… » Monsieur, je n’ai rien de plus à vous en dire, ne frappez plus mon nez et ma bouche,mes dents vous le demande, de grâce…je ne le referai plus et si,je dis bien, si je le peux…je reprendrais les membres de ma famille ».

    Abasourdi, le pauvre Inspecteur lui remit pour le compte un aperçu de sa grande miséricorde. En clair, afin de faire connaître son brouillon le pauvre homme, se retrouva sans dents, sans famille et le pire de tous…sans son futur Best-Seller.

    Car…oui, un autre passant dans l’impasse choppa le brouillon,ne le jeta pas, fit valoir ses droits auprès du taxi qui complaisant l’amena voir le Monstrueux Homme Blanc, qui lisant quelques lignes en tomba presque à genoux.

    À dire que le voleur de mots s’en trouva fort heureux.

  2. Pascal Mezier dit :

    … les frères Tamarok voient des taxis sortir de temps en temps de la gueule noir obscur du grand hangar situé en bout de l’impasse déserte. Comme une bave, ils sortent lentement, leurs carrosseries noires luisent. Les vitres aussi sont noires. À la hauteur du panneau « taxi », ils accélèrent franchement sans jamais attendre personne.
    Et pour cause…
    Le bâtiment immensément haut est gris, semble-t-il, sale, du peu qu’ils peuvent voir. Un seul réverbère diffuse une faible lumière jaune pisse, les autres, tels de noirs soldats immobiles armés de lances, montent la garde.
    Curieusement l’endroit grouille de monde les après-midi, uniquement entre quatorze et dix-huit heures précises.
    D’autre part quelque chose en ce lieu leur rappelle leur prime jeunesse, sous l’ère soviétique dans l’Oblast de Vologda à huit cents kilomètres au nord de Moscou. L’Oblast de Vologda ! Un vieux monde oublié gouverné en son temps par un riche commerçant. Il possédait — paraît-il — tous les immeubles du centre-ville de Tcherepovets. Mais les frères Tamorok eux, n’ont jamais habité Tcherepovets !

    Leurs origines, issues d’un des huit mille petits villages de l’Oblast, viennent de plus loin encore au nord de Tcherepovets, près du lac Onéga.
    Leur père pêchait sur ce lac. Avec plusieurs compagnons de galères du village, il emmenait ses jeunes fils très tôt le matin, aider à sortir des barcasses d’un hangar en bordure de l’eau. Un hangar similaire à celui de l’impasse des Arts… et duquel partait une grossière rampe de lancement métallique sur une longue pente de bois brut. Le seul moyen qui permettait de franchir la grande bande enherbée vaseuse avant l’eau claire et profonde. Sortir les barcasses n’était rien ou presque. Quand il fallait les remonter, un véritable travail de forçat commençait pour les frères Tamarok. En attendant, à eux les basses corvées de la journée. Le soleil était souvent à l’horizon à fleurer la crête des sapins. Avec une température la plupart du temps très au-dessous de zéro, tailler les coins, enrouler les filins, graisser les rails et les galets, préparer les paniers, recoudre les filets meurtrissait sauvagement leurs doigts. Quant à remonter les barcasses pleines ! Souvent les moteurs des treuils tombaient en panne d’essence ou de mécanique et l’argent manquait. Ils passaient en manuel sans sourciller, sans parler. Ils n’étaient alors pas trop de deux pour s’arcbouter de tous leurs poids sur le gouvernail. Leur père à quelques mètres du hangar les commandait du regard, seulement du regard. Aux autres il guidait d’une voix sûre. La manœuvre était dangereuse. Les barcasses déjà très lourdes à vide, en vieux bois imbibés d’eau, pouvaient parfois déraper avec le gel, sortir des vieux guides usés. Pour autant, jamais les frères Tamarok ne se sont plaints, ils sentaient que leur père voulait leur donner, leur léguer un des seuls biens qu’il possédait.

    La force. Une force de malin.

    Cette force, ils la dissimulent maintenant dans des corps minces et de grande taille, sous des pardessus marron-clair de demi-saison.
    Le froid vif de Nantes en ce mois de décembre leur parait comme un bel été. Ne reverront-ils jamais le bleu vert translucide du lac Onéga ? Ça n’était pas non plus ce soir en tous les cas, qu’il allait se passer quelque chose. Grigory emboita le pas de son frère jumeau Saveliy pour quitter l’endroit. Ce n’est pas lui qui porte l’épais paquet cette fois. Il est une heure du matin. D’un pas lent et souple, ils débouchent rapidement rue Basse Porte. Grigory ralentit et lève la tête sur la façade de la salle de concert Paul-Fort, une façade moins haute, mais du même cachet que le hangar. Une brume épaisse les fait s’abriter un moment sous les halles vides du marché Talensac. Saveliy repère un carton de bananes à moitié défoncé abandonné au sol au pied d’une structure métallique rouillée.
    Il le secoue du pied, attend, puis se baisse et plonge la main. Il se tourne vers son frère en souriant avec trois bananes en main. Ils avaient leur petit-déjeuner du lendemain, leur dernier jour.

    C’est à Grigory de dormir sur le lit cette nuit. Saveliy baisse la tête pour admirer au travers de la lucarne, les toits nantais, le château des ducs de Bretagne, les bords de l’Erdre.
    « Le clochard n’était pas là ce soir.
    Oui, j’ai remarqué.
    Peut-être est-il parti ailleurs, qu’il ne reviendra pas ?

    Tu ne réponds pas. »
    Saveliy se retourne d’un quart sur la couche en faisant grincer des ressorts.
    « Il reviendra. Tu te souviens de ses yeux, c’est notre seule piste. »
    Grigory est d’accord. Sans ôter son pardessus, il s’allonge à même le sol, dépose religieusement l’épais paquet sous sa tête. C’est vrai que les yeux du clochard sont comme ceux de leur père. Des yeux presque noir, impénétrables qui recèlent pourtant comme une infinie tendresse.

    Toute la journée ils arpentent encore une fois les rues de Nantes à la recherche de taxis noirs.
    Sans être surpris, ils n’en voient aucun.
    Passé vingt-trois heures, ils quittent le quartier de la gare, se dirigent pour la huitième et dernière fois impasse des Arts. C’est ce soir leur dernière chance.
    Des skinheads, des boneheads une branche dure, qui les repèrent quand ils traversent le jardin public les suivent plus ou moins et sans grande discrétion. En passant, Grigory lève encore les yeux sur la façade de la salle de concert Paul-Fort. Ce soir une « presque compatriote » très populaire dans les années cinquante à Léningrad revient en France, son pays de naissance. Il reconnait tout à coup ce visage, mais ne dit rien à son frère.
    Edith Piekha. Certes, elle parait nettement plus âgée, mais aucun doute n’est permis. Cette femme à l’affiche et celle sur une photo avec leur père ne font qu’une.

    Tout en marchant, cotes à cotes sur l’étroit trottoir, Grigory tourne légèrement la tête et plonge ses yeux dans ceux de Saveliy. Tel leur père jadis, une intense seconde.
    Dès aussitôt, les deux frères savent enfin qu’ils n’ont pas fait tout ce voyage en vain. Sans que rien dans leurs attitudes ne puisse les trahir, ils continuent du même pas, lent et souple de se diriger vers l’impasse des Arts. Les skinheads se font plus discrets, ils sentent l’aubaine à mesure que leurs proies s’enferment dans le cul-de-sac. Ils sont au nombre de six.
    En vue du réverbère jaune pisse à environ deux cents mètres, les frères Tamarok ralentissent sensiblement le pas. Il est bientôt minuit. La gueule noir obscur du grand hangar semble définitivement figée ouverte, en attente de baver ou même de vomir. Grigory songe que quelque chose doit se produire maintenant, que ça ne peut arriver que de cette grande gueule et de nulle part ailleurs. Cent mètres encore et ils sont à l’aplomb du réverbère jaune pisse. Mais les skinheads sont maintenant plus près d’eux, vingt mètres, peut-être même seulement dix.

    Alors, ils se retournent d’un bloc. Lentement.
    Si lentement, qu’un moment les crétins sont décontenancés. Grigory regarde à nouveau son frère droit dans les yeux puis son regard ripe d’un cil vers la gueule noir obscur derrière eux. Saveliy enregistre et marche à reculons jusqu’à s’éloigner de plusieurs pas de son frère. Ce faisant, il se rapproche un peu plus du grand hangar.
    Si crétins qu’ils fussent, les skinheads sentent que la partie ne s’annonce peut-être pas aussi facile qu’il y parait ; bien qu’ils soient supérieurs en nombre et rodés aux castagnes les plus brutales, une petite voix lointaine tente de résonner dans leurs casseroles vides qui leur servent de têtes.
    Avant d’avoir compris quoi que ce soit, ni même ouvert le feu, les deux bouledogues trop près de Grigory sont à terre. Il s’était servi de ses pieds, tenait encore l’épais paquet de la main gauche. Quand trois autres, convaincus d’avoir un ennemi à leurs tailles, s’élancent ivres de rage, Grigory, sans se retourner, le lance très haut derrière lui…

    Au même moment un taxi sort de l’ombre et roule lentement. Saveliy, le paquet récupéré, sait qu’il doit arriver le premier au panneau « taxi ». Juste avant que cette voiture ne s’élance, il frappe énergiquement sur la vitre du conducteur. Celle-ci baisse avec le chuintement caractéristique d’un modèle de luxe. Saveliy reconnaît sans peine le clochard habillé en livrée. Ils se dévisagent un instant. Un homme en place arrière montre à peine son visage.
    « N’ayez crainte, donnez-le-moi. Je m’engage. La Russie saura qui était votre père. »
    Une voix posée. Un visage vaguement connu de mémoire de Saveliy. Ce denier n’hésite plus et lui tend le manuscrit.
    Alexandre Routskoï, le président de la Fédération de Russie au mandat le plus court de tous, vingt jours seulement dans les années 1990, remercie d’un vague sourire.
    « Peut-être devriez-vous rejoindre votre frère maintenant, ce serait dommage… »
    L’élève officier de la garde rapprochée du général Djokhar Doudaïev de l’armée de l’air soviétique, prend tout de même le temps de claquer les talons en faisant un court salut de la tête.
    Quand le dernier skinhead enregistre vaguement, au bruit de bois sec qui craque, que sa mâchoire se fracasse sur la bordure du trottoir, le taxi accélère à vive allure.

    • Liliane dit :

      Bonjour Pascal,

      D’abord bienvenue sue le site de Pascal.
      Ensuite, merci pour ton message sympa concernant mon texte.

      Globalement, j’apprécie ton texte.
      Le mystère, la grisaille, les bons et les méchants.
      Place au mystère et à l’angoisse.

      Heureusement qu’il y a eu « les casseroles vides » qui m’ont fait sourire, sinon, je serai morte étouffée d’avoir oublié de respirer.

      Mais voilà, mes petits doigts me disent que ce texte, histoire oblige, n’est qu’un aperçu.

      Me trompe-je ?

      Amicalement.

      Liliane

      • Pascal Mezier dit :

        Bonjour Liliane,
        Merci, et de ton accueil sur le site de Pascal, et de ton commentaire sur mon texte.
        J’ai franchement souri à le lire. J’ai d’autant mieux compris pourquoi, à l’opposé du mien, je trouvais ton texte frais, léger, vivant…
        C’est que, les doigts sur le clavier, le front collé à l’écran, j’ai rien vu venir de la noirceur dans laquelle j’ai enlisé cette histoire.
        Mais bon, l’essentiel est bien de se lâcher n’est-ce-pas…
        Le texte n’est pas un aperçu, il est né comme ça et ne grandira plus. Toutefois je le garde en notes. Qui sait, peut-être me resservira-t-il….
        A bientôt pour d’autres aventures…
        Pascal

  3. Michel-Denis ROBERT dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré, une station de taxis, Impasse des Arts. Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage, escomptant une faveur inespérée : être édité.

    La tradition remontait à la fin du XIXème siècle, à l’époque où les citadins louaient les cabriolets pour quelques sols. Les rues s’animèrent de véhicules de plus en plus esthétiques et confortables. L’accroissement des voyageurs et celui de la circulation se traduisirent par l’extension de la station, au fond de l’impasse. La cour d’Hubert se mit à grouiller de gens de toutes origines, parmi eux des lettrés vantant les avantages du progrès.

    Avec l’augmentation du trafic hippomobile, se multiplièrent les inconvénients liés à la propreté des rues et à la sécurité des passants. Mais le progrès, en marche depuis quelques siècles, continua son oeuvre. Un jour Hubert, le patron de la station, fut sidéré de voir arriver sur ses terres, un cab électrique. Personne ne l’avait prévenu. Pas de coup de fil, rien !

    – Mais qu’est-ce que ce coupé, coupé de ses jambes, s’écria-t-il !

    Il en eut les pattes coupées. Le nouvel arrivant ne se démonta pas. Il se dirigea calmement vers Hubert. Mais celui-ci, pourtant en connaissance, eut un mouvement de surprise, comme s’il fut en présence d’un extra-terrestre. Son confrère avait abandonné les rênes pour un volant.

    Ho ! N’ayez pas peur ! dit celui-ci. Venez, je vous emmène faire un tour.

    Hubert se laissa convaincre de chevaucher l’engin, non sans avoir pris la précaution de se faire accompagner de son chien, au cas où celui-là se rebellerait. Et voilà partis les deux hommes et l’animal, sur leur drôle de machine. A peine quelques kilomètres d’élan, Pierre, le collègue d’Hubert donna toute la puissance. A vingt kilomètres à l’heure, le bolide prit les virages dans les conditions les plus périlleuses.

    – Arrête-toi ! lança Hubert épouvanté, cheveux au vent, accrochant le bras du pilote pour le faire ralentir, tu vas nous faire tuer.

    – Mais non ! répondit Pierre en pleine vitesse, fier de montrer sa découverte. Regarde, je peux piler sur cent mètres.

    – On rentre, intima Hubert, en cachant sa frayeur. Mon chien ne supporte pas la vitesse.

    – Attends ! Je vais te montrer autre chose.

    Avisant un groupe de personnes qui se promenait au bord du chemin, Pierre fonça.

    – Fais attention, cria Hubert.

    – N’aie pas peur, te dis-je, je suis équipé.

    Avant de doubler les gens surpris par le bruit mécanique, et qui se retournèrent sur la machine infernale, Pierre donna du klaxon. Un meuglement rauque retentit et les fit bondir de stupeur. Pierre éclata de rire.

    De retour à la station, Hubert se remit de ses émotions. Oubliant Pierre, il sauta sur son téléphone :

    – Allo ! (Il appelait son collègue de la station Saint Fiacre. Il demanda s’il était au courant de l’arrivée de ces casse-cous.) Je me suis fait berner, à mon insu par Pierre, dit-il, essoufflé. Plus jamais de ma vie, je ne monterai sur un tel engin. De plus, je crois qu’à plus ou moins long terme, ma profession va disparaître.

    Quelques mois plus tard, Hubert afficha un avis qui disait :

     » Erudits, nous avons besoin de vous, nous pouvons éditer à moindres frais, vos réflexions sur le progrès. Rendez-vous ce samedi, à la station des Arts, à partir de dix heures ! »

    Des dizaines d’écrivains en herbe se ruèrent sur l’aubaine, munis de leur manuscrit. La sélection commençait dès leur arrivée. Hubert n’avait pas prévu tant de prétendants. Les auteurs de mauvais écrits passaient à la trappe dans la pièce d’à côté.

    – Ben voilà ! leur disait-on. Votre écrit est prometteur, mais trop spécifique, trop pointu, il n’intéressera qu’une minorité.

    A leur grande surprise, en échange d’une édition dans trois ans, Hubert leur fit une annonce :

    – Nous vous proposons une formation sur cab électrique. Et vous serez sûrs d’avoir un job dans notre belle station de taxis. Et nous prélèveront quelques deniers sur votre salaire mensuel, pour payer vos frais d’édition. Vous ne le regretterez pas, je vous le promets.

    • FOURET dit :

      C’était un lieu de culte très vénéré,
      une station de taxi, impasse des Arts.
      Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage.
      Escomptant une faveur inespérée : être édité.
      À leur grande surprise…
      lorsqu’ils arrivaient, émus, exités, souvent après des heures, des jours d’un voyage périlleux, il n’y avait rien… rien du tout… une simple impasse en cul de sac… pas d’enseigne, pas de numéro, pas de plaque… rien
      Ils tournaient, faisaient demi-tour, remontaient à l’entrrée de l’impasse… vérifiaient le nom sur la seule plaque vieillotte encore visible. Presque tremblants, ils consultaient fébrilement la carte qu’ils avaient obtenu après de longues recherches et négociations : souvent ils avaient presque tout donné pour l’obtenir. Pourtant ils étaient bien au bon endroit, celà ne faisait aucun doute…
      Alors, ils retournaient au bout de l’impasse, scrutant le moindre seuil, la moindre fenêtre poussièreuse à la recherche d’un indice si petit soit-il. Tous, ils serraient contre eux une boite grise sans aucune autre distinction qu’un code chiffré qu’on leur avait communiqué avec la carte. Certains passaient leurs mains sur les pierres des murs, d’autres cherchaient à regarder par les fenêtres ou tentaient d’ouvrir les quelques portes déséspéremment closes. C’était fou : il n’y avait rien, ni personne… Seul un silence pesant contrastait avec leurs soupirs, le bruit de leurs chaussures sur les pavés. L’un d’entre eux, soudain, jeta la boite au sol et repartit en éructant « j’abandonne »… Un autre s’assit prostré le long d’un mur… Celà faisait près de 4 heures qu’ils tournaient en rond dans cette impasse… une éternité et rien ne se passait. Petit à petit, les porteurs de boite finirent par s’énerver, et partir…
      Le plus jeune d’entre eux s’accroupit, intrigué devant le mur du fond… il posa sa boite là ou auparavant, il devait y avoir une porte… il s’assit à coté tranquillement et sortit un carnet, un crayon et commença à écrire comme si de rien n’était…
      Le bruit d’un moteur l’arracha à son ecriture… il leva les yeux et aperçut un vieux taxi jaune se garer à sa hauteur. un très vieux taxi au moins aussi vieux que cette impasse… Il aperçut une plaque la porte lorsque celle-ci s’ouvrit « Impasse des Arts – Maison d’Edition ».
      Un homme en smoking en sortit et l’invita à le rejoindre d’un geste de la main : « Félicitations, vous êtes notre nouveau vainqueur. Venez mon cher, je croie qu’il est temps que votre manuscrit sorte enfin de sa boite pour être édité »

  4. C’était : Une histoire triste, mais au passé. Ouf !
    un lieu de culte très vénéré : malheureusement dans notre pays on ne tolère pas les prières de rue – qui seraient pourtant nécessaires dans ce cas précis – même quand ces rues sont des impasses. Et même pour invoquer le dieu Taxi.
    Une station de taxi : La particularité de ce genre de station, en France tout au moins, c’est qu’en général aucun taxi n’y attend. Et les prières, même en pleine rue, n’y font rien. Car les apparitions, qualifiées de divines, sont rares. Et peuvent être espacées de plusieurs siècles. C’est du même ordre que les apparitions de la Vierge.
    Impasse : Une impasse est une rue qui ne possède qu’ une seule issue. Et encore ! Le seul échappatoire est la direction d’où vous venez ! Le retour au point de départ, qui plus est par le même chemin ! Le radotage, quoi !! A moins de continuer dans l’autre sens et de foncer dans un mur. Ou vers un no man’s land, vers un terrain vague, autrement dit un nulle part. Et de toute façon la route s’effacera sous vos pas…
    Notez que dans les deux cas vous serez bon pour payer les réparations de la voiture. Donc prévoyez des frais supplémentaires pour votre entreprise.
    Si vous foncez dans le mur, la station de taxi est en fait une offre d’embarquement dans la barque de Charron.
    Et personnellement je préfère donner un pourboire exorbitant à un chauffeur de taxi plutôt qu’une obole à Charron.
    C’est comme au jeu de l’oie. Vous avez mal tiré les dès. Vous êtes sur la case « mort » et prié de retourner au départ. Notez que reprendre tout au début est une mésaventure qui arrive fréquemment aux candidats à l’édition.
    Il n’empêche que placer une station de taxi dans une impasse, ça tient du sadisme !
    Impasse des Arts : L’Art qui ne mène nulle part n’est pas de l’Art. Il s’agit donc d’une chimère multiforme, en fait un leurre. Vous voilà prévenus ! Méfiez vous des enfarinades ! Hélas fréquentes !!
    Tous les casse-cous : Ça se précise ! Les clients potentiels de tout à l’heure sont bien des kamikazes, comme leur comportement le laissait prévoir. Ils veulent savoir s’ ils passeront à travers le mur de l’impasse ou si les amortisseurs vont résister aux marmites qui creusent le terrain vague !
    En tous cas, maintenant on sait  de quelle œuvre il s’agit : le film « Taxi » de Luc Besson. Inénarrable sur le thème des fous du volant. A voir pour se mettre dans la peau des candidats à ce genre de voyage. Stress garanti ! Accrochez vos ceintures !
    S’y rendaient : toujours ce passé !… De quand date la dernière fois déjà ?…
    En pèlerinage : Évocations de processions sans fin chez les éditeurs avec bénédictions sans lendemains des grands prêtres de l’édition qui ne sont pas avares de litanies réconfortantes. Ce genre de pèlerinages demande une infinie patience et abnégation aux repentis qui ne peuvent que promettre, à la fin d’une longue confession douloureuse, de surtout recommencer la prochaine fois.
    Escomptant : La porte du paradis n’est qu’entrouverte, mes frères ! Profitez de votre attente interminable du taxi salvateur pour relire « la porte étroite » de Gide.
    Une faveur inespérée : La faveur du Prince. Courbettes, mea culpa, macérations, et espoir si ténu !Mais nous sommes en république, que diable ! Piston interdit, hein !
    Être édité : Le Graal !! Remarquez que chez Chrétien de Troyes, sa quête a occupé pas mal de volumes. C’était au XIIe siècle. Les derniers à l’avoir cherché (le graal) doivent être les Nazis au milieu du XX eme . Ça fait quand même huit siècles entre les deux. Et à ma connaissance on ne l’a pas encore retrouvé !.. Sans compter que c’est tout de même un peu long pour attendre un taxi….
    A leur grande surprise : Et si après tous ces avertissements vous êtes encore surpris par un imprévu, surtout n’hésitez pas à m’écrire. Je ne manquerai pas de le relater dans mon prochain parcours type du combattant!

  5. Clémence dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré, une station de taxi, impasse des Arts.  
    Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage.
    Escomptant une faveur inespérée : être édité. 
    À leur grande surprise…

    A leur grande surprise, en ce jour, les notes vibrantes de la « Fantaisie » de Ludwig von Beethoven s’échappaient des portes grandes ouvertes. Les casse-cou de l’écrit profitèrent de l’aubaine et pénétrèrent dans la petite station de taxi.
    Après avoir trébuché sur deux marches inégales, ils s’émerveillèrent de la beauté de la voûte romane en pierres dorées. Les rayons du soleil jouaient avec les vitraux et dessinaient une délicate mosaïque.

    Un des casse-cou tendit le bras et tous les regards se tournèrent : au bas d’une fenêtre à l’arc doucement arrondi, des lettrines et des lettres défilaient. Les exclamations fusèrent aussitôt.
    – C’est quoi, ce texte ?
    – Ce contenu si… désuet!
    – C’est d’un élitisme, d’un ésotérisme… !
    – C’est …

    Les derniers paroles s’estompèrent en même temps que le texte manuscrit. Il disparut et laissa place à des caractères anguleux.
    – On nous prend pour qui ?
    – La Bible ? Et pourquoi pas le Coran ou le Petit Livre Rouge ?
    – L’accès au savoir pour tous…
    – Cela ne nous mènera à rien de bon !
    – Mais si…ça ira, ça ira … chanta une voix audacieuse…

    Après un roulement sourd, la petite station fut plongée dans l’obscurité. Un silence assourdissant répondit puis les doléances explosèrent. Deux minuscules signes cabalistiques, reproduits par milliers s’emparèrent des murs et de la voûte.
    – Un – zéro – un – zéro…
    – Oui – non – oui – non – …
    – Ouvert – fermé – ouvert – fermé…
    De longues traînées vert fluo animèrent l’espace de mille danses sauvages.

    Les casse-cous de l’écrit rejoignirent la farandole. Les mots s’apocopaient, la ponctuation déraillait, la conjugaison déclinait, le style s’essoufflait, …
    – Au secours ! hurlaient les uns !
    – Victoire ! s’époumonaient les autres…

    Une rixe apocalyptique transforma la nef en champ de bataille. On s’étripa, on argumenta, on surenchérit, on s’ancra dans le passé, on se projeta dans le futur.
    Certain pleuraient les anciens. D’autres encensaient l’audace.

    Des hologrammes surgirent et se mêlèrent aux casse-cous. Les uns prêtèrent plume forte à coups d’oxymores, de métaphores et de litotes. Les autres hurlèrent à l’euphémisme, au paradoxe et au zeugma.

    De tout ce brouhaha surréaliste s’éleva une voix, douce comme la tolérance, aux accents vibrants d’une anaphore.

    Ô écrivains
    Ô écrivains du samedi ou du dimanche
    Ô écrivaillons
    Ô casse-cous de l’écrit
    Chantez ici réunis
    La douce mélopée de la langue de Voltaire, de Molière et de Musso réunis !

    Ô écrivains
    Ô écrivains du samedi ou du dimanche
    Ô écrivaillons
    Ô casse-cous de l’écrit
    Plongez dans les entrailles de l’étymologie.
    Et extrayez le sens premier de ce lieu.
    Tàssô, devenu taxi…
    N’avez-vous entre vos mains
    Le plus bel arrangement ?

    Telles les ouailles après l’Ite libérateur, ils s’égayèrent
    Ni honteux, ni confus
    Mais heureux d’avoir au bout des doigts
    Au bout de la langue
    Le plus bel outil créé par l’Homme.

    © Clémence.

  6. Perrat sylvianne dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré, une station de taxi, impasse des Arts.
    Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage. Escomptant une faveur inespérée : être édité.
    À leur grande surprise, une nuée de points-virgules bloqua la circulation. Cette ponctuation compliquée, souvent mal utilisée et souvent boudée décida la grève générale. Malgré toutes les prières, aucun écrit ne serait honoré jusqu’à nouvel ordre. La perplexité paralysait les neurones du jury. L’encre sympathique des stylos était figée. Des murs de mots s’élevèrent à l’entrée de l’impasse.
    Impasse des arts, c’était l’impasse ! Aucun taxi à l’horizon.
    Chacun se bousculait au carrefour, avec son livre sous le bras. La foule ânonnait l’alphabet comme un mantra. L’un argumentait auprès du piquet de grève. « Je vous assure, ma ponctuation est impeccable ! Lisez, lisez je vous en prie… » L’autre à genoux sur la Bible, livre le plus édité à ce jour, récitait une prière.
    Rien n’y fit. Un point-virgule, c’est têtu ! Né entre le point et la virgule, il a bataillé toute sa vie pour se faire une place.
    Impasse des arts, c’était une belle pagaille. Quand certains argumentaient, d’autres priaient. « Oh Dieu des mots, Déesse des lettres, je vous en prie, glissez mon manuscrit au-dessus de la pile »
    D’autres vendaient leur âme. Tout, tout pour être édité : le graal !
    Un matin, le Président approcha. A pied. Sans escorte. Sans garde du corps. Fier et digne. La foule s’effaça. Il marcha jusqu’à l’autel. Il posa son livre « MOI, président ». Un livre sans aucune ponctuation. Ce geste fort débloqua la grève. Les points-virgules, penauds, se dispersèrent dans l’alphabet en silence.
    Tous les livres furent déposés, calmement, comme le fit le Président.
    Le jury lut tout, tous les livres.
    Le jury remit le premier prix à Monsieur le Président.

  7. patrick labrosse dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré,
    une station de taxi, impasse des Arts.
    Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage.
    Escomptant une faveur inespérée : être édité.
    À leur grande surprise, à l’entrée du prestigieux palace de l’édition, l’homologue des éditions la pléiade version roturière, on avait provisoirement installé un long corridor. De chaque côté de ce couloir, se dressait plusieurs lignes de barbelés. Du haut d’un mirador, un gradé vous invitait à respecter l’ordre d’arrivée. Plusieurs molosses se jetaient sur les grillages dès que vous murmuriez à votre voisin les mots révolution, transition, pion ou encore auto édition.
    A l’entrée du bunker, une foule de badauds, était sagement alignée. On faisait la queue comme à la boucherie ! Lorsque vous arriviez péniblement au guichet, on vous remettait un questionnaire d’une dizaine de feuillets qu’il vous fallait méticuleusement remplir. Sur celui-ci, figurait d’innombrables enquêtes sur votre pédigrée : Des personnages illustres avaient-ils honoré votre génome ? Votre grand père n’avait-il pas était transsexuel ? Votre grand-mère tenancière d’un bordel de campagne ? Aviez-vous une maladie orpheline ? Préfériez-vous le chocolat ou la confiture de fraise ? Utilisiez-vous des préservatifs « bio » ? Si oui : A raison de quelle quantité par semaine ? Votre animal de compagnie était-il exotique ? Aviez-vous un tatouage en forme de cœur sur le bras droit ? …
    Une fois en possession de ce questionnaire, vous pouviez accéder à la salle Numéro deux. Un vélodrome avait été réquisitionné pour les besoins de la cause. Là on vous conseillez de vous asseoir sans faire de bruit et de remplir sans broncher le fascicule officiel. A voir la tête des surveillants, d’illustres staliniens aux moustaches fournies, personne n’osait demander l’endroit où vous pouviez pisser. Selon l’avis de ma voisine, une dénommée Marceline Loridan-Ivens, un poil rebelle, Il fut possible que les questionnaires obstruent les conduites d’eaux usées. Enfin, il était de bon ton de lever la main pour poser une question et de remercier avec politesse les gentils matons !
    Une sonnerie stridente vous indiquez le temps imparti pour remplir et rendre vos questionnaires. Exactement, trois minutes et vingt-deux secondes, qui s’affichaient sur un compte à rebours enclenchait dès que l’amphithéâtre fut plein. Certains qui tentaient de continuer à écrire une fois le délai écoulé, furent saisi manu militari et personne n’osa demander ce qu’il advint de leur personne.
    Mais on devait rester discret, chacun pour sa peau, le graal vous attendait peut être au bout du tunnel ?
    Lorsque les questionnaires furent bien empilés, chacun fut sommé par l’intermédiaire d’un mégaphone de se ranger dans une ligne. Ligne un : les agrégés de lettres, ligne deux : les journalistes, ligne trois : les fortunés ; ligne quatre : les profs et consorts, ligne cinq : les politiques ; ligne six : les cinglés… Forcément, nous étions nombreux à rejoindre la dernière ligne !
    Chaque rangée fut convoquée à une heure précise pour rejoindre la prochaine salle. Evidemment la première rangée fut conviée en priorité, escorté avec moult serviteurs, champagne et petits fours… la seconde suivit sous le crépitement des flashs, la troisième se déplaça avec grandiloquence, la quatrième eut droit à une petite bouteille d’eau pour patienter, la cinquième fut invité à présenter ses passes droits et enfin la dernière ligne fut priée de revenir à une date ultérieure…

    Evidemment la dernière ligne s’insurgea : Il y eut des cris, des hurlements, un brouhaha de protestations… Mais la grande maison d’édition avait tout prévue, elle repoussa les gueux en diffusant un concert de belles citations : du Rimbaud, Verlaine, Hugo, Wilde… on eut même droit à un chapitre entier des misérables ! On dévoyait les dieux de l’écriture pour vous soumettre, vous inciter à rebrousser chemin. Nul ne pouvait se présenter devant le panthéon de l’édition avec un vulgaire ouvrage de bas étage.
    Certains, commencèrent à enflammer leurs manuscrits et à les jeter par-dessus les barricades… Quitte à mourir, autant le faire avec éclat …
    Les bourgeois de l’édition, quelque peu dérangés, malgré l’isolation phonique de haute manufacture qui revêtait les murs de leur bunker, jetèrent un œil dédaigneux à travers les carreaux, puis finirent par tirer les rideaux. Mais que voulaient donc ces scribouillards ? Des terroristes du verbe, poètes de l’école maternelle et rappeurs affligeants! Qu’on dresse la potence et qu’on fasse un bucher de leur misérable ramassis de paperasse insipide. S’insurgea l’un d’entre eux !
    Mais les indignés continuaient à hurler comme des chiens ! Ils ne se contenteraient pas uniquement de pain ou de mauvais vins, ni même de champs de cannabis. Ils voulaient des engagements, des contrats d’éditions, un revenu minimum, un statut d’intermittent de l’écriture.
    D’urgence on fit appel à une délégation d’académicien. Ces derniers se présentèrent dans leur costume d’apparat et tentèrent de raisonner ces insouciants ! Mais la horde d’écrivaillons était trop nombreuse, elle entendait s’exprimer, obtenir le luxe d’écrire… elle était affamée d’encre et de mots !
    Les hauts dignitaires firent appel au ministère de la culture, il fallait d’urgence convoquer une cellule de crise : Le peuple voulait écrire !
    Dans l’urgence, le gouvernement prodigua une loi : fahrenheit 451 !
    Les barricades de livres furent enflammées, on assassina discrètement quelques manifestants, un suspicieux prénommé Massoud fut conduit à l’échafaud, un sang d’encre coulait dans les caniveaux.
    La révolution de papier fut très vite matée et les petits scribouilleurs emprisonnés pour outrage et diffamation envers la noble maison d’édition.
    Tout cela aurait dû rester dans les catacombes du détail si un malencontreux poète n’eut pas diffusé avec force décibels la petite chansonnette de Léo ferré :
    La poésie contemporaine ne chante plus. Elle rampe. Elle a cependant le privilège de la distinction, elle ne fréquente pas les mots mal famés, elle les ignore. Cela arrange bien des esthètes que François Villon ait été un voyou. On ne prend les mots qu’avec des gants: à « menstruel » on préfère « périodique », et l’on va répétant qu’il est des termes médicaux qui ne doivent pas sortir des laboratoires ou du codex….Les plus beaux chants sont des chants de revendication. Le vers doit faire l’amour dans la tête des populations. A l’école de la poésie, on n’apprend pas: on se bat !

  8. Odile Zeller dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré,
    une station de taxi, impasse des Arts.
    Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage. Escomptant une faveur inespérée : être édité. À leur grande surprise, aucune file d’attente, aucun comptoir, juste un taxi jaune et noir la porte ouverte. Quand je m’approchais une voix calme m’annonça : montez en voiture si vous et3s muni d’un manuscrit publiable.
    Je montai dans le véhicule la porte se referma et j’entamais un parcours à travers les rues labyrinthiques d’un quartier bourgeois. Puis la voiture stoppa et la voix annonça : «  Descendez de la voiture qui vous attendra. A la borne vous saisirez le thème de votre œuvre et répondrez aux questions avant de remonter dans ce véhicule. Si vous êtes toujours dans la sélection. »
    Effectivement une borne était la. Personne ne l´utilisait. Après avoir saisi la thématique le logiciel tourna quelques instants et écrivit thématique acceptée, originalité moyenne ( 763 manuscrits dont 3 publiés) vous êtes invité à continuer le parcours.
    Au bout de quelques minutes nouvel arrêt. Une autre borne m’invitait à scanner une page de mon œuvre. Un logiciel tourna quelques instants et livra le jugement suivant. Orthographe correcte : deux fautes, vocabulaire satisfaisant : une répétition, un cliché et une impropriété. Typographie insuffisante… le logiciel tourna un moment et afficha : manuscrit accepté sous réserve.
    Mon assurance en prit un coup mais le taxi était toujours là.
    Je passai avec succès l’étape intrigue et la suivante sur les personnages. Selon le programme l’ensemble valait 6 à 7 sur 10.
    Je préserverai et à la dernière étape un humain m’attendait impatient et peu souriant. Je n’eus droit à aucun bonjour … une main s’empara de mon manuscrit et tourna les talons.
    Dans la voiture la voix annonça le retour au point de départ et que la maison d’édition Œuvres nomades m’informerait sous 6 mois de la suite à donner à mon livre selon le jugement du comite de lecture.

    Six mois plus tard une lettre et un mail m’informait que mon œuvre ne pouvait être publié avant 2019 voire 2020.

  9. françoise dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré,
une station de taxi, impasse des Arts.
    Tous les casse-cou de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage.
Escomptant une faveur inespérée : être édité.
    À leur grande surprise ce matin-là , il n’y avait plus de station de taxi 5et l’impasse avait changé de nom : elle s’appelait désormais l’impasse Jean d’Ormesson
    Certains crièrent comme des ânes, d’autres au scandale, beaucoup furent anéantis ,
    d’autres plaignirent les habitants de celle-ci qui auraient à effectuer moult démarches administratives relatives à tout changement d’adresse.
    Mais ils étaient tous désespérés, le terme n’est pas trop fort. Que faire ?
    Eux qui ne s’adressaient jamais la parole se mirent à discuter. L’un proposa de participer à «  Lire en Fête «  dont les journées auraient lieu au mois de mai; d’autres proposèrent d’aller lire leurs oeuvres dans des maisons de retraite et pourquoi pas dans les écoles.
    Un des participants qui ressemblait comme deux gouttes d’eau à Jacques Prévert leur suggéra de garder les pieds sur terre. Tous savaient, ajouta-t-il, qu’ils ne seraient jamais publiés mais il ajouta que ce n’était pas une raison de ne pas continuer à écrire s’ils y trouvaient du plaisir.Il leur proposa de se réunir dans un jardin public, une fois par mois, pour lire à voix haute des extraits de leurs « oeuvres ». Il fut applaudi très fort. Pour corser le tout leur dit-il les participants pourraient se déguiser, un jour en Victor-Hugo, une autre fois en Boris Vian, pour les hommes, en Marguerite Duras, en Françoise Sagan , pour les femmes,etc etc.
    Et c’est ainsi que déguisé(es) chaque mois ils se retrouvèrent au Jardin des Plantes et lirent à tour de rôle quelques pages.
    Le bouche à oreille fonctionnant, ils eurent de plus en plus de public, des amitiés et aussi des amours se nouèrent. Et devant le succès remporté, les séances eurent lieu tous les quinze jours. Des ventres s’arrondirent, des « écrivains » cessèrent de venir mais d’autres arrivèrent…..
    Pour ceux que çà intéresserait les séances ont lieu les premiers et troisièmes samedis de chaque mois. L’après-midi se termine par un pot au café des arts.
    A ce jour, aucun de ces écrivains-amateurs n’a été publié mais la belle affaire !!!

  10. Cetonie dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré, une station de taxi, impasse des Arts.
    Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage. Escomptant une faveur inespérée: être édité.
    Très imbu de moi-même, et persuadé de mon talent depuis que j’avais eu quelques félicitations de mes compagnons de l’atelier d’écriture, je décidais de m’y rendre illico, sans prendre la peine de vérifier l’information : je ne m’étonnais pas qu’un éditeur tint sa permanence à une station de taxi, je ne retenais que le mot « arts » puisque je me prenais pour un artiste !
    Mon GPS me guida sans peine à l’adresse indiquée, une petite impasse bordée de jardins en fleurs dans une lointaine banlieue. J’y pénétrais confiant, cherchant des yeux cette fameuse station de taxis, et avançais ainsi lentement jusqu’au fond de l’impasse, sans rien trouver. Je me garais donc, et questionnai un passant « où se trouve la station de taxis de l’Impasse des Arts? » Il me regarda d’un air perplexe : comment avais-je pu imaginer qu’un taxi viendrait attendre ses clients dans un coin aussi perdu ?
    Pendant que nous parlions, l’impasse s’était remplie de voitures et de piétons, qui, tous, posaient la même question que moi : ils cherchaient le lieu de pèlerinage où les attendrait un éditeur généreux qui accepterait de réaliser leur vœu le plus cher : être édités !
    Les habitants de l’impasse se mêlèrent à nous, et, dans le brouhaha, je compris qu’eux aussi étaient des passionnés d’écriture, sans qu’aucun n’ait jamais eu la chance d’être édité.
    D’ailleurs, ajoutèrent-ils, vous voyez bien que c’est une impasse, et avec cet embouteillage, je vous souhaite bonne chance pour en sortir ! Pour patienter, prenez votre crayon, vous avez le temps de rédiger au moins une nouvelle, peut-être même un roman !

  11. Jean-Pierre LACOMBE dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré,
    une station de taxi, impasse des Arts.
    Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage.
    Escomptant une faveur inespérée : être édité.
    À leur grande surprise, ce jour là, ce n’était pas le vieux libraire aux relations tentaculaires dans le monde de l’édition et au flair redoutable reniflant rapidement le manuscrit qui va cartonner,
    mais un rat de bibliothèque, un vrai rat gras et gris qui se tenait assis sur ses pattes arrières sur le capot d’un taxi mauve.
    Il ne lisait pas les feuillets que lui tendait un petit homme voûté, effrayé et plein d’un espoir absurde, mais les grignotait avec gourmandise au fur et à mesure.
    Curieusement, à coté de lui, s’empilaient d’autres tapuscrits auxquels il n’avait pas touché.
    Le petit homme le regardait fasciné. Le rat rota de satisfaction et du taxi sortit une femme brune aux lunettes noires qui se dirigea droit vers le bonhomme lui tendant une main gantée légèrement hésitante.
    « Félicitations, je publie votre livre, voyez vous depuis mon accident je ne fais confiance qu’à Grasset pour éditer de nouveaux romans, les yeux fermés, et ce n’est pas une image. »
    Disant cela, elle caressait l’animal qui grimpa vivement sur son épaule.
    Elle disparut dans le taxi qui sortit de l’impasse lentement, laissant le petit homme stupéfait.
    Souris donc se disait-il, souris…

  12. iris79 dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré,
    une station de taxi, impasse des Arts.
     Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage.
    Escomptant une faveur inespérée : être édité.
    À leur grande surprise… 
    Quand ils arrivaient sur les lieux, rien n’indiquait que l’on se trouvait dans le temple de l’édition. Une porte surmontée d’un bloc lumineux de taxi leur confirmait tout de même que l’on se trouvait au bon endroit. De grandes photographies en noir et blanc protégées par des vitres et des encadrements imposants rappelaient l’histoire des lieux sur les murs de part et d’autre de la porte. Il suffisait de pousser cette lourde porte qui avait remplacé le portail imposant derrière lequel dormaient les taxis parisiens autrefois pour découvrir et pénétrer toute la solennité du lieu.
    De larges canapés profonds et colorés étaient disposés dans ce très vaste espace sans cloison. L’ambiance y était feutrée et studieuse. Les murs blancs étaient recouverts de tableaux aux couleurs vives et éclatantes et au milieu de ces taches éparses, des linéaires de livres cloisonnaient l’espace tel un labyrinthe au centre duquel se trouvait le bureau du grand chef, le bureau de celui qui en dernier lieu apposait son tampon sur une œuvre et décidait seul, de l’avenir des aspirants écrivains.

    La particularité, l’agencement des lieux et la politique du grand chef voulaient que chaque personne venue tenter sa chance devait d’abord s’engager dans le grand labyrinthe de livres et trouver lui-même le bureau du grand chef, bureau qui n’était bien sûr pas indiqué. Ce qui obligeait chaque postulant à s’engager dans les méandres de livres pour trouver son chemin. La tache était ardue et il était de notoriété publique qu’aucune personne travaillant ici n’était habilitée à aider les personnes à trouver le chemin d’une part et que d’autre part, certains ne l’ayant jamais trouvé s’en était retourné, confus, honteux et découragé, leur manuscrit sous le bras et le regard fuyant.

    Le parcours pouvait se montrer pourtant passionnant. Et il était utile et habile de prendre des repères sur les étagères car bien entendu, aucune classification n’apparaissait. Mais avec un peu de stratégie, la tache n’était pas impossible puisque certains y parvenaient ! Et ceux là commençaient par signer une close de confidentialité leur faisant promettre par contrat que jamais il ne révélerait leur secret. Il leur fallait ensuite répondre aux questions du grand manitou, questions parfois incongrues mais qui permettaient à cet éditeur vénéré de cerner la personne en face de lui, son amour pour l’écriture et les arts et une certaine vision de la vie. L’aspirant écrivain devait ensuite défendre son œuvre, sélectionner de son propre chef des passages de son travail qui lui semblaient les mieux et les moins réussis, s’en expliquer en toute honnêteté.
    Le chef exprimait ensuite son avis sur son désir de continuer à travailler avec la personne qui lui faisait face ou sa déception de ne pas pouvoir continuer l’entretien. Mais il avait toujours de précieux conseils à prodiguer à chacun d’entre eux et des mots justes, réconfortants et constructifs. Sa réputation n’était plus à faire, c’est pourquoi tant de casse-cous de l’écriture se mettaient au défi de le rencontrer.

  13. Nadine de Bernardy dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré,une station de taxi,impasse des Arts.Tous les casses-cou de l’écrit s’y rendaient en pélerinage,escomptant une faveur inespérée:être édité.
    A leur grande surprise,quand ils sortirent de leurs taxis respectifs,un manuscrit sous le bras, un cierge dans la main,les casses-cou,certains vieux, claudiquant,d’autres arrogants,plein de morgue,n’hésitant pas à bousculer ceux qui les gênaient pour arriver en tête de file,tous virent un car de police et des ambulances barrant l’impasse.
    Un cordon de sécurité avait été mis en place,les forces de l’ordre s’activaient,une âcre odeur de fumée prenait à la gorge.
    L’un des arrivants,monsieur de Maupassant,se dirigea vers un policier en civil:
     » Que se passe-t-il mon brave,quelle est la raison de ce remue ménage?
    – Il y a eu crime,interdiction de passer
    – Ciel,s’écria Maupassant,mais encore?
    – Un dénommé Hugo,accompagné de Mr Sartre et Mme Duras sont venus ce matin, comme à leur habitude, tenter d’obtenir gain de cause auprès des éditeurs.Devant la mauvaise volonté de ceux-ci Mr Hugo,exaspéré,sortit une arme et tira sur les responsables.
    Ils étaient deux je crois: Gallimard, qui a été tué sur le coup et Hachette gravement blessé.
    En tentant de calmer le forcené Mr Sartre a laissé tomber la pipe qu’il avait à la bouche,ce qui a mis le feu au bâtiment,avec tout ce papier vous comprenez…
    Madame Duras hurlait « Au feu »!Les pompiers sont arrivés, mais trop tard.On n’a rien pu sauver.C’est triste. »
    Maupassant,atterré, alla donner des nouvelles à ceux qui attendaient plus loin.Il reconnut Kafka,Gary,Simenon et beaucoup d’autres.
    Ils n’en croyaient pas leurs oreilles,étaient anéantis,en colère et peu enclins à plaindre les victimes.
    Hugo sortit,les menottes aux poignets,suivi de Mme Duras le visage noir de fumée,soutenue par un Sartre en piteux état.
    Un silence profond régnait dans les rangs.
    Chacun repartit, serrant son épreuve contre son coeur,se demandant déjà vers qui se tourner dorénavant.
    Mr de Maupassant,homme courtois, revint vers le policier afin de le remercier de sa coopération:
     » Merci brave homme pour ces renseignements
    – De rien Mr de Maupassant,je ne fais que mon métier
    – Ah! vous me reconnaissez, dit l’écrivain,flatté,à qui ai-je l’honneur?
    – Commissaire San Antonio pour vous servir ».

  14. grumpy dit :

    La maison d’édition «Plumes de Poids» convoqua de toute urgence un Conseil d’administration restreint. Ça ne pouvait plus durer. Il fallait discuter, trouver une solution et ensuite passer à l’acte. En effet, depuis ces deux dernières années elle recevait de telles quantités de manuscrits d’auteurs en quête et en peine d’éditeur, qu’après la saturation vint l’étouffement. A deux doigts de périr d’asphyxie la situation étant devenue intenable, le Conseil se réunit donc en conclave.

    Figurait à l’ordre du jour de cette réunion impromptue, le fait que :

    – La Poste du quartier avait porté plainte après s’être trouvée obligée de procurer à son facteur un camion benne afin qu’il soit en mesure de livrer à Plumes de Poids ces quotidiennes quantités de petits paquets amoureusement enveloppés et dûment timbrés (par des auteurs qui se révéleraient après lecture en diagonale l’être pour la plupart tout autant.)

    – Les Services municipaux suivirent, eux aussi forcés d’utiliser un camion poubelle pour évacuer des piles et des piles de manuscrits, visiblement lus à la va-vite, présentant le plus souvent leur couverture annotée au crayon rouge et au choix : zéro, nul, écrit par un dingo manifeste, malade le mec, poubelle, au pilon, à la trappe, aux chiottes, etc …

    – En réponse à la question « mais qu’est-ce qu’ils ont donc tous ces scribouillards à la petite semaine, ces écrivaillons en quête de gloire, bourrés d’illusions quant à leur talent et à l’intérêt de ‘l’œuvre de leur vie’, cette petite chose pondue lors de l’accouchement douloureux de ces obscurs plumitifs ? »

    Le Conseil décréta à la majorité moins une voix, que la meilleure chose à faire était sans aucun doute de demander à l’ordinateur central d’effectuer un tri drastique entre les jugés bons et les jugés mauvais, et d’adresser à ces derniers une convocation personnelle à un horaire bien précis leur laissant entrevoir quelque espoir.

    Rouges de plaisir, gonflés d’auto-flatterie, le cœur battant déjà plus vite à l’idée d’être enfin un talent reconnu, les éliminés se pressèrent impasse des Arts. Là, chacun poussa à son tour la lourde porte cochère, suivit la plaque de cuivre fléchée « Réception des Auteurs », pénétra dans un corridor obscur, toujours très obéissant dans ses petits souliers bien cirés pour l’occasion unique, appuya sur la sonnette au-dessus de la petite étiquette « sonnez et entrez »

    Oui, à la trappe, c’est bien ce qui arriva à chacun d’eux lorsqu’elle s’ouvrit sous ses pieds, obéissant à chaque déclenchement de la sonnette.

    La police fluviale de la Seine qui repêcha cadavre après cadavre constata qu’ils émanaient tous du même égout, cependant ces éliminations ayant été effectuées si discrètement, n’élucida jamais ce mystère de Paris.

    Le Conseil d’administration de Plumes de Poids, soulagé mais peu désireux d’avoir à renouveler cette expérience risquée et malgré tout douloureuse, vota pour la résolution de ne plus jamais publier que des historiens qui, eux au moins, font toujours preuve d’imagination pour à l’infini faire du neuf avec du vieux.

  15. laurence noyer dit :

    À leur grande surprise, J-C, chauffeur de taxi nouvellement engagé, leur demanda de quitter l’impasse et de suivre un autre itinéraire avec la Carte de l’Inattendu:

    Lève-toi
    et marche vers ces faubourg Fabuleux
    Où se retrouvent chimères et astres radieux
    A la Fontaine des Faveurs, change l’eau en divin
    Et fait de ton esprit le maitre souverain
    Marche sur l’eau des rêves à la Cour des Miracles
    Où flotte l’inespéré des célestes Oracles.
    Suis le chemin perdu
    De la fécondité
    et rends la vue
    à tout l’inexploré
    En passant sur les quais de Lazare
    récolte des pièces d’or dans la bouche des Prophètes
    Pêches le miraculeux à tous les coins de rue,
    Ressuscite la poussière attelé sous tes pas
    Envahis les boulevards, apaisent les tempêtes
    d’un mouvement de plume, d’un tracé provisoire
    Dans le square fleuri des Idées Illusoires,
    guéris ta main blessée, entravée de stigmates.

    Quitte l’Impasse
    Car si tu veux marcher,
    il faut d’abord
    te lever.

  16. Maryse Durand dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré, une staion de taxi, impasse des Arts. Tous les casse-cous de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage. Escomptant une faveur inespérée : être édité.
    A leur grande surprise…
    chaque taxi portait un écriteau bien visible : romans, policiers, contes, science-fiction… Le lunaire Pierrot, tout juste descendu de son rayon, s’engouffra dans celui arborant un panneau sur lequel « Contes merveilleux » s’inscrivait en lettres luminescentes. A peine la portière refermée, le taxi roula en bout de piste, et le chauffeur annonça : « Attention, décollage immédiat ». Halluciné, Pierrot sortit le carton de sa poche indiquant bien « Impasse des Arts » ! Mais le taxi aterrissait déjà et Pierrot se retrouva dans la fidèle réplique de cette fameuse impasse qu’il recherchait.
    L’impasse des Arts était composée de maisons accolées l’une à l’autre, de couleurs différentes, et celle devant lui, couleur fuchsia, portait la mention « Contes merveilleux ». Avec un ouf de soulagement, Pierrot poussa la porte qui s’ouvrit d’elle-même, et sous ses pieds un tapis roulant l’entraîna dans des décors divers et variés : forêts, châteaux, princes et fées, et Pierrot souriait, souriait…
    A l’extérieur, d’autres taxis débarquaient d’autres passagers qui s’engouffraient chacun dans la maison correspondant à sa spécialité littéraire, était happé et transporté par tapis roulant, qui dans une rue sombre d’un quartier mal famé où les pruneaux n’étaient pas comestibles, qui dans un vaisseau spatial, en route pour une nouvelle galaxie. Un régal pour ces casse-cous qui tentaient de prendre des notes, mais tout allait beaucoup trop vite…
    Pendant ce temps, notre lunaire Pierrot avait perdu le sourire : ayant aperçu, l’espace d’un instant, la divine Colombine, il n’avait de cesse de la retrouver et courait dans les décors, sans jamais pouvoir l’approcher. C’est ainsi qu’il commit l’irréparable : il prit le tapis roulant à contre-sens, ce qui était strictement interdit ! Mais Pierrot n’avait pas lu le règlement et poursuivait sa quête. C’est alors que la sanction prévue tomba : un à un les décors s’évanouirent. Pierrot se retrouva seul, dans une maison vide dont le toit venait d’être aspiré vers l’ailleurs…un à un les murs tombèrent, et, par un effet domino, entraînèrent les murs des maisons voisines, jaune, rouge, verte, plus une seule maison n’était visible.
    C’est ainsi que des armées de candidats à l’édition se retrouvèrent désarmés dans cette impasse des Arts désarticulée.

  17. durand dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré. Une station de taxi, impasse des Arts. Tous les casse-cou de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage. Escomptant une faveur inespérée: être édités.

    A leur grande surprise, mais fallait t’il qu’ils soient naïfs, un lieu d’espoir, situé dans une impasse, à priori, ça n’ouvrait pas de vastes perspectives.

    Rien de vraiment artistique, dans cette ruelle encore pavée. Juste un grand mur peint, comme par hasard, en trompe l’œil.

    Le seul intérêt de ce cul de sac revenait aux habitants du lieu. Les passants qu’ils observaient à l’aller proposaient au retour des mines déconfites, un air d’en vouloir à tout le monde, au sale type n’ayant pas prévu d’issue à leur déambulation littéraire.

    Ils se sentaient moqués par derrière les fenêtres. Et ils l’étaient.

    Le lieu de culte, une petite chapelle désaffectée ouvrait selon des horaires très fantaisistes. En plus, c’était payant. Mais pour le prix, on ne vous fournissait même pas un bout de chandelle. Juste la possibilité d’allumer le concierge, qui en avait vu d’autres.

    C’était un très vieux gardien du temps à la peau parcheminé. Normal, il avait commencé comme collaborateur auprès d’un certain Gustave F. Puis nègre auprès d’un général rédigeant ses souvenirs de colonies de vacances. Puis tailleur de crayons auprès d’un Roger P, futur ministre.

    Enfin, cet espace confiné entre des murs fadasses et un plafond gris n’engendrait que bien peu de réussites. La station de taxi périclitait. Un seul véhicule, un pousse-pousse ramené des mille et une nuits de l’Orient. Les rares élus y prenaient place, fêtaient leur livre à l’opium tout en slalomant leur future gloire sur les Champs Elysées.

    Les autres, la majorité, la masse compacte bien que gélatineuse ressortait à pied de l’impasse. Ils accompagnaient leurs mornes pas vers la station toute proche, celle qui allait les gratter pendant longtemps…la station Picpus!

  18. Liliane dit :

    C’était un lieu de culte très vénéré.
    Une station de taxi, impasse des Arts.
    Tous les casse-cou de l’écrit s’y rendaient en pèlerinage.
    Escomptant une faveur inespérée : être édités !

    A leur grande surprise, la rue était vide.
    Pas un taxi. Pas une voiture. Ni moto. Ni vélo.
    Des barrières. Des soldats.

    C’est qu’il fallait montrer patte blanche.
    Chaque manuscrit était vérifié.
    Papier recyclé obligatoire. Absence de page vierge.

    En cas de non-respect, un homme tout de noir vêtu, sauf la casquette, rouge, équipement typique du chauffeur de taxi, approchait et devait raccompagner le renégat dans ses pénates.

    Sinon, le lieu sacro-saint s’ouvrait à ces âmes gonflées d’espoir.
    Silencieusement, chacun choisissait un prie-livre, s’y agenouillait et glissait son manuscrit dans l’appareil situé sur le pupitre, communément appelé mange-livre.

    C’était alors le moment de prier Apollon, d’invoquer Calliope, Polymnie ou tant d’autres, susceptibles d’intervenir dans la décision de ces robots intelligents qui étaient en train de disséquer leur œuvre.

    Le mépris de l’orthographe et de la grammaire, le manque de créativité, les récits casse-cul des écrivaillons étaient rapidement sanctionnés : condamnés à la déchiqueteuse.
    Un voyant rouge s’allumait.
    Et aujourd’hui, pas de surprise. Pas de voyant vert. Pas d’élu.

    Ils se lèvent, se dirigent vers la sortie, les bras ballants, les yeux éteints.
    Ils ne voient même pas que les soldats ont disparu, que les taxis sont revenus, que l’impasse des Arts revit.

    Ils n’ont même plus de mots pour pleurer.
    Ils sont dans une impasse, celle du désespoir.

    Mais l’an prochain, d’autres viendront.
    Et auront une grande surprise…

    • Pascal Mezier dit :

      bonsoir Liliane,
      j’ai beaucoup aimé ton texte, il est frais, il y a une belle pirouette de fin.
      Je viens pour ma part de publier pour la première fois sur le site de Pascal et sur la même proposition, l’impasse des arts…
      Pourrais tu me lire, me dire ce que tu en penses ?
      Je t’en remercierai vivement
      Amicalement
      Pascal Mezier

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